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Interview Doubs : «Je suis opposé à l’euthanasie pour des raisons médicales, philosophiques et juridiques»

par José GONZALVEZ, 24/10/2014
Montbéliard. Eminent spécialiste de la question de la fin de vie, le Dr Bernard-Marie Dupont était invité par le comité d’éthique de la maison Blanche, à Beaucourt, à donner une conférence devant les personnels soignants de l’Aire urbaine.

L’Est Républicain : Un sondage BVA nous apprend que neuf Français sur dix se disent favorables à l’euthanasie. Qu’en pensez-vous ?

Dr Bernard-Marie Dupont : D’abord, je me méfie des sondages. Ainsi, un autre sondage réalisé la semaine dernière par trois organes de presse sur les progrès de la médecine a produit des résultats qui laissent perplexes. Un sondé sur deux dit en substance que les progrès de la médecine doivent servir à lutter contre la mort ! Donc, d’un côté, les gens sont favorables à l’euthanasie et, de l’autre, ils disent qu’il faut lutter contre la mort. Vous voyez que cette question de fin de vie est quelque chose d’extrêmement confus, le vocabulaire employé est lui-même complexe, puisqu’on parle tantôt d’euthanasie, tantôt d’arrêt des soins, de sédation, de soins palliatifs et j’en passe. Pour revenir aux sondages, tout dépend de la manière dont la question est posée.

Vous êtes vous-même catégoriquement opposé à la légalisation de l’euthanasie. Pourquoi ?

Je suis opposé à l’euthanasie pour des raisons médicales, philosophiques et juridiques. Pas du tout pour des motifs religieux et encore moins idéologiques. Je n’ai rien à voir avec ceux qui manifestent contre l’avortement par exemple. En réalité, l’euthanasie est une question extrêmement complexe et terrible.

L’affaire Vincent Lambert, d’un côté, et le procès du Dr Nicolas Bonnemaison, de l’autre, donnent une image brouillée de la problématique de la fin de vie en France. Où en sommes-nous clairement aujourd’hui ?

Justement, ce n’est pas clair du tout ! C’est le gros brouillard au contraire. Mais je dirais qu’il s’agit de deux affaires différentes. Le Dr Bonnemaison a agi sans en parler ni aux patients, ni au personnel de son service, ni aux familles. Il a mis fin à la vie de sept patients sans avoir recueilli leur consentement. D’un point de vue juridique, c’est un crime et je comprends l’avocat général qui fait appel du verdict d’acquittement, car il ne peut pas faire autrement.

L’affaire Lambert est extrêmement complexe médicalement. S’ajoutent des problèmes familiaux terribles. Mais cela dit, si Vincent Lambert est en vie, c’est le résultat des progrès de la médecine. La question ne se serait pas posée il y a cinquante ans. Il n’y aurait pas eu d’affaire Lambert. C’est important de considérer le fait qu’on va avoir de plus en plus de gens dans cette situation. La question posée est donc celle de la notion de progrès de la médecine et celle aussi de l’attitude de la société face à ces gens-là. Est-elle en état de les accepter, ces gens qui sont jeunes, en bonne santé, mais qui coûtent cher ? Ça va faire exploser les références ! Mais une chose est sûre : ce n’est là que le résultat des progrès de la médecine !

Et vous êtes convaincu que la société n’est pas prête à les accepter ?

Je pense qu’on a fait le choix, pour des raisons économiques, d’éliminer ceux qui coûtent plus cher qu’ils ne rapportent. On a inventé le 4e âge, c’est quelque chose d’effarant, de jamais vu. Aujourd’hui, l’espérance de vie est de 86 ans pour une femme. Une femme sur deux qui naît aujourd’hui a toutes les chances de devenir centenaire ! Mais forcément, on va découvrir des pathologies liées au grand âge et créant de la dépendance. Or personne ne maîtrise le financement de tout ça. Ce qui fait que les enfants auront la responsabilité de deux générations : leurs parents et leurs grands-parents. On a calculé le coût pour la société de chaque année de vie gagnée : il est de 211.000 €. Qui va payer ? Donc, pour des raisons évidentes d’économie de santé, on pratiquerait massivement si l’euthanasie était légalisée ! On voit bien l’exemple de la Belgique : la loi autorise l’euthanasie et elle était censée tout verrouiller. Or, au vu des questionnements qui agitent la société belge, on est en droit de s’interroger si l’euthanasie ne va pas être le moyen de vider les prisons de tous les délinquants sexuels ?

La loi Leonetti est-elle suffisante ? Peut-elle et doit-elle évoluer ? Si oui, dans quel sens à votre avis ?

J’ai dit, et cela en présence de Jean Leonetti, que cette loi était mal écrite. Si j’étais député, je demanderais son abrogation, car on peut en faire deux lectures contradictoires. Cette loi est confuse, écrite dans la précipitation, surtout destinée à protéger le corps médical. Personnellement, je ne vois que cette évolution-là : l’abrogation.

A partir de quel stade peut-on parler d’acharnement thérapeutique ?

J’ai lu récemment que 100 % des Français sont contre l’acharnement thérapeutique. Mais, qu’est-ce que l’acharnement thérapeutique ? Une forme de prise en charge qui irait au-delà de l’intérêt du patient ? Mais qu’est-ce que l’intérêt du patient ? Dans le cas de Vincent Lambert, par exemple, c’est quoi l’acharnement thérapeutique ? C’est une question difficile.

Quel est le plus important pour la médecine : le maintien en vie ou le bien-être du patient ?

Pour moi, c’est d’abord la vérité du patient qui est la plus intéressante. Son avis évolue d’un jour sur l’autre, mais il doit être la vérité première, l’Alpha et l’Omega. Il a besoin d’être éclairé. Alors bien évidemment, le bien-être du patient prime. Il faut toutefois accepter l’idée qu’en médecine, on a créé des monstres, qui posent des questions sans réponses.

Propos recueillis par José GONZALVEZ

Source estrepublicain.fr