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L'euthanasie n'est pas la solution au mal-mourir

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Aujourd'hui, on décède de plus en plus rarement sans qu'une intervention médicale n'interfère avec la mort dans les mois ou les jours qui la précèdent. Ce sont les conséquences d'une médecine qui est de plus en plus efficace à guérir ou à stabiliser les maladies. De fait, la mort et la médecine ont de plus en plus maille à partir et c'est un phénomène qui n'ira qu'en augmentant. Il n'est donc pas surprenant qu'on s'interroge aujourd'hui de nouveau à l'occasion de la campagne présidentielle sur la place de la médecine face à la mort et sur l'opportunité de légaliser l'euthanasie.

Pourtant, cette question a été largement débattue en commission parlementaire pendant des mois, en 2004 puis en 2008. La loi française a été adaptée par deux fois pour mieux accompagner la fin de vie. Un juste équilibre a été trouvé. La loi permet aujourd'hui de traiter toutes les douleurs, d'apaiser toutes les souffrances. Les médecins sont désormais tenus de renoncer à toutes formes de traitements devenus vains. Arrêter l'acharnement thérapeutique relève dorénavant du juste soin. Soyons clairs : la fin de vie n'est plus aujourd'hui en France un problème d'ordre législatif. C'est un problème culturel qui concerne aussi bien les soignants que les soignés.

Nommons les choses par leur nom. Se prononcer en faveur de l'euthanasie consiste désormais à vouloir légaliser l'injection létale de barbituriques et de curares. Il s'agit en pratique d'exiger du personnel soignant qu'il donne activement la mort, c'est-à-dire qu'il arrête le cœur du malade pour traiter sa souffrance. Si les Français demandent légitimement et majoritairement à mourir dans la dignité, peut-on pour autant imaginer qu'ils adhèrent en masse à cette démarche ? Contrairement à l'idée largement répandue, l'euthanasie ne renforce pas le droit des malades mais augmente encore, paradoxalement, le pouvoir des médecins. C'est en réalité un geste d'une grande violence qui n'apaise pas la fin de vie des patients et de leurs proches mais qui, au contraire, multiplie les deuils pathologiques et génère une division des équipes soignantes. Ce que l'on présente comme une idée progressiste, qui pouvait encore faire illusion dans les années 1970, lorsque les moyens de lutte contre la douleur étaient limités et les médecins souvent enfermés dans la toute-puissance, est un concept devenu archaïque.

Quant à la Belgique et aux Pays-Bas souvent érigés en modèles sur le sujet,  il est faux de prétendre que leur système ne connait aucune dérive. La légalisation de l'euthanasie remet en cause dans ces pays les interdits, fondements de toute civilisation, qui s'effacent peu à peu au profit des habitudes prises. Ainsi la proportion des euthanasies non voulues y est-elle élevée. Les médecins hollandais avouent eux-mêmes que les traitements sont arrêtés parfois très rapidement dans leur pays pour des raisons purement économiques. Les euthanasies pratiquées sont d'ailleurs souvent suivies de prélèvements multi-organes en Belgique flamande. De plus, la tombée d'un tabou génère toujours une nouvelle revendication. L'ordre des médecins hollandais défend ainsi à présent l'euthanasie des patients âgés "souffrant de la vie" ou victimes de démences.

On le voit, l'euthanasie légalisée entraîne un changement complet de la culture du soin et du rôle social de la médecine. Voici ce qui arrive quand on a la naïveté d'autoriser par la loi un acte qui doit rester une transgression. D'ailleurs, depuis 2002, seul le Luxembourg a suivi la voie ouverte par la Hollande et la Belgique. L'Allemagne, le Royaume-Uni, l'Espagne et la Suède ont adopté des textes proches de la loi française de 2005. Le Conseil de l'Europe s'est prononcé le 25 janvier dernier contre l'euthanasie et a souhaité que l'on renforce le droit des malades par la promotion des "directives anticipées".

La question du mal-mourir demeure en France comme partout ailleurs une question politique. La régulation économique du soin, qui indexe la plus grande partie du financement des hôpitaux à leur activité, doit être revue. Comme le Royaume-Uni, nous devons favoriser la démarche palliative et donner à cette spécialité l'autorité et le crédit nécessaires pour lutter contre certains groupes de pression, notamment médicaux et pharmaceutiques, qui poussent à l'acharnement, leur fonds de commerce. Il faut aussi instaurer le "droit à voir sa souffrance soulager en fin de vie", comme l'a fait le gouvernement Zapattero dans son projet de loi de juin 2011.

Il est aujourd'hui inadmissible que les patients souffrent. La culture du soin doit connaître aujourd'hui une révolution comparable à celle qu'elle a connue lorsque la loi du 4 mars 2002 (relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé) a donné aux patients accès à leur dossier médical. Cette mesure, d'abord mal vécue par les médecins, a de fait apporté plus de transparence à la relation soignés-soignants. Notre société doit impérativement mieux anticiper la fin de vie, en favorisant la rédaction des "directives anticipées", rédigées par le patient lorsqu'il est en possession de ses moyens mentaux et applicables lorsqu'il n'est plus en mesure d'exprimer sa volonté. Ces directives doivent êtres enregistrées dans la carte vitale de chacun afin que nul soignant ne puisse les ignorer. Cela peut se faire par décret. Ce serait enfin une façon d'affronter le tabou de la mort, de prévenir les situations de conflits et de renforcer les droits des patients.

Source :  lemonde.fr