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Fin de vie : tisser ou rompre le fil ?

par Dr Marine Sahut d'Izarn, 25/05/2021

 coeur ecg

Marine Sahut d’Izarn, médecin à l’hôpital Ambroise Paré. Travaillant en soins palliatifs, cette pneumologue décrit comme cette mission patiente donne du sens à sa vie.

« N’attendez pas d’être à ma place pour savoir quel sens vous voulez donner à votre vie ! ». Installée dans son lit, au sein d’une unité de soins palliatifs parisienne, ses yeux d’un bleu limpide étaient rivés dans les miens.

À quelques jours de sa mort, elle m’interpellait, moi, l’étudiante de sixième année de médecine venue apprendre à « gérer » la fin de vie de mes patients, et tester ma capacité à faire face à ces situations. Ses mots faisaient voler en éclats la vision fragmentée de la médecine qu’on m’avait enseignée sur les bancs de la fac, organe par organe, telle une mécanique dont on apprend les rouages, les dysfonctionnements et les pannes. Ils venaient remettre au centre de ma préoccupation d’apprenti-docteur la personne humaine, dans toutes ses dimensions, sa complexité et sa beauté.

La rencontre avec un patient

Car en soins palliatifs c’est bien de cela qu’il s’agit : rencontrer et soigner un patient unique, avec sa maladie, ses symptômes, mais aussi le retentissement qu’a sa maladie sur son quotidien et « sa vie intérieure » - psychique et spirituelle. Le retentissement sur ses proches aussi, car la maladie de l’un, c’est la préoccupation et la souffrance des autres.

À l’opposé d’une vision qui laisserait à penser qu’on passe en soins palliatifs lorsque les médecins baissent les bras et qu’on est en toute fin de vie, j’y ai découvert une médecine de pointe que j’exerce aujourd’hui le plus tôt possible dans l’histoire de la maladie des patients atteints de maladie grave, que je suis parfois durant de longs mois voire années. Une médecine sans compromis lorsqu’il s’agit de soulager des symptômes. Une médecine d’excellence quand il s’agit de communication et de relation. Une médecine qui voit large et qui sait écouter aussi bien les maux du corps que ceux du cœur.

Quand le corps fait défaut

Voilà que cette patiente me questionnait sur le sens que je donnerais à ma vie, et me donnait à voir en miroir ce qui, au crépuscule de la sienne, interroge le cœur de chaque homme, de chaque femme qu’il m’a été donné de rencontrer : ma vie a-t-elle eu et a-t-elle encore du prix ? Fait-elle encore sens alors que le corps fait défaut et qu’arrive la dépendance ? Pour qui et pour quoi ? Ma patiente avait trouvé sa réponse : l’amour de sa famille, de ses enfants et petits-enfants, traversait sa vie comme un fil conducteur éclairant ses années.

Aujourd’hui à son école, j’essaie avec mon équipe d’aider ceux que je rencontre à retrouver le fil rouge de leur existence. Dans une vie percutée par la violence de la maladie et les épreuves de la vie, nous cherchons ensemble ce qui fait sens à leurs yeux et sa déclinaison possible au temps présent. Des fils qui se tissent, d’autres qui se renouent, avec ces proches dont on s’est éloigné, avec soi-même parfois.

L’accompagnement

C’est tout cela que contient pour nous ce mot parfois galvaudé ou dit trop vite : « accompagnement » ; animé d’un profond respect pour chaque personne rencontrée, et de la conviction que chaque vie peut être soutenue et vécue jusqu’au bout malgré l’épreuve. Une maïeutique patiente et humble devant la souffrance d’autrui qui constitue pour moi – à mon tour de répondre à la question de ma patiente ! - le sens de mon engagement de médecin.

(1) Praticien hospitalier au sein de l’équipe mobile de soins de support, soins palliatifs et traitement de la douleur de l’hôpital Ambroise Paré (AP-HP) à Boulogne, auteur de « En première ligne COVID 19, lettres du front », Éditions Balland, 130 p., 9 €

Source : le-croix.com