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par Emmanuel Hirsch

Professeur d'éthique médicale, université Paris Sud

Dans un texte du 8 février 2013 qu'il rend public aujourd'hui, le Conseil national de l'ordre des médecins exprime une position favorable à l'euthanasie par « devoir d'humanité ».

Ne voulant pas se marginaliser et intervenir dans le débat lancé par François Hollande le 17 juillet 2012, le CNOM a souhaité prendre de cours le Comité consultatif national d'éthique qui doit se prononcer à se sujet dans les prochaines semaines, saisi par le chef de l'État le 18 décembre dernier. L'échéance est le projet de loi annoncé pour juin prochain.

La rupture profonde ainsi décidée constitue un élément qui s'avèrera déterminant. Depuis des années l'instance ordinale maintenait en effet une position identique à celle promue par l'Association médicale mondiale. Une opposition absolue à l'euthanasie assortie d'un refus de tout acharnement thérapeutique et d'un soutien inconditionnel à la démarche des soins palliatifs. Il s'agit de l'esprit même de la loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie désormais contestée de plein fouet par l'instance qui l'avait transposée dans son code de déontologie.

Le CNOM ne prend pas pour autant une position très originale puisqu'il s'inspire, 13 ans plus tard, de l'avis n° 63 du Comité consultatif national d'éthique « Fin de vie, arrêt de vie, euthanasie » du 27 janvier 2000 : « Face à certaines détresses, lorsque tout espoir thérapeutique est vain et que la souffrance se révèle insupportable, on peut se trouver conduit à prendre en considération le fait que l'être humain surpasse la règle et que la simple sollicitude se révèle parfois comme le dernier moyen de faire face ensemble à l'inéluctable. Cette position peut-être alors qualifiée d'engagement solidaire. [...] Une sorte d'exception d'euthanasie, qui pourrait être prévue par la loi, permettrait d'apprécier tant les circonstances exceptionnelles pouvant conduire à des arrêts de vie que les conditions de leur réalisation. »
Euthanasie légitime ?

Renforcé dans sa position par une enquête IPSOS réalisée en janvier 2013 qui fait apparaître que 60 % des 605 médecins interrogés s'affirment favorables à une euthanasie dite « active », tout en précisant que seuls 37 % d'entre eux souhaitent participer à la phase d'administration des produits, le CNOM s'attache à relier la sédation « terminale » à une forme d'euthanasie « légitime ».

La question de la sédation (injection de médicaments ayant pour visée d'atténuer les souffrances, de contrer les douleurs réfractaires et de privilégier ainsi une qualité d'existence jusqu'à son terme) avait fait l'objet d'une approche assez similaire dans le rapport « Penser solidairement la fin de vie, remis par Didier Sicard à François Hollande le 18 décembre 2012. À n'en pas douter elle va constituer un des aspects centraux de l'approche du législateur dans les moins qui viennent. À titre « exceptionnel » la sédation pourrait avoir une autre finalité que celle qui l'encadrait initialement. L'enjeu sera certainement de définir et de circonscrire le concept d'exception, cela d'autant plus que chaque fin de vie est en soi individuelle et donc exceptionnelle.

Dans sa position « Fin de vie « assistance pour mourir », le Conseil national de l'ordre des médecins affirme : « Sur des requêtes persistantes, lucides et réitérées de la personne, atteinte d'une affection pour laquelle les soins curatifs sont devenus inopérants et les soins palliatifs instaurés, une décision médicale légitime doit être prise devant des situations cliniques exceptionnelles, sous réserve qu'elles soient identifiées comme telles, non pas par un seul praticien mais par une formation collégiale.

Une sédation, adaptée, profonde et terminale délivrée dans le respect de la dignité pourrait être envisagée, par devoir d'humanité, par un collège dont il conviendrait de fixer la composition et les modalités de saisine. Ce collège fonderait son avis sur l'évaluation de la situation médicale du patient, sur le caractère réitéré et autonome de sa demande, sur l'absence de toute entrave à sa liberté dans l'expression de cette demande. »

Le 20 juillet 2012, dans une proposition de loi visant à mieux prendre en compte les demandes des malades en fin de vie exprimant une volonté de mourir, le sénateur Gaëtan Gorce, évoque lui aussi cette prise de décision « collégiale » qui n'est pas sans interroger. Qu'en serait-il en fait de l'autorité d'une instance ainsi destinée à autoriser ou non l'euthanasie d'une personne ?

Ces quelques questions conjoncturelles ne sauraient en quoi que ce soit perturber un mouvement de fond désormais légitimé par l'instance ordinale. Ce que dit explicitement le CNOM, c'est que la pratique de l'euthanasie n'est désormais plus contraire à la déontologie médicale. Voire, elle en constituerait une nouvelle dimension d'humanité...

Lorsque le Président de la République a initié le 17 juillet 2012 cette concertation nationale portant sur « l'assistance médicalisée pour terminer sa vie dans la dignité » (en référence à la mesure n° 21 de sa campagne électorale), je ne suis pas certain qu'il espérait le soutien si rapide et si entier d'une instance plus réputée pour son conservatisme que pour son audace. Il y trouvera certainement une reconnaissance de son implication personnelle dans un domaine à ce point sensible qu'il aurait pu solliciter de la part de l'ONM une position plus substantielle et constructive qu'un assentiment opportuniste.

Source : emmanuelhirsch.fr      plusdignelavie.com

A lire :

L'intégral du Communiqué du Conseil National de l'Ordre des Médecins

La position de l'Association Médicale Mondiale