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Euthanasie: "Le Conseil de l'Ordre ouvre à nouveau la confusion"

Propos recueillis par Vincent Olivier, publié le 14/02/2013 (extraits)

Pour la première fois, le Conseil de l'Ordre envisage "une sédation adaptée, profonde et terminale" pour certains patients.

Informé par L'Express de la position de l'Ordre des Médecins sur la question de l'euthanasie rendue publique le 14 février, le Pr Denys Pellerin s'avoue "surpris" par cette évolution. Président honoraire de l'Académie de médecine, le Pr Pellerin avait été le rapporteur pour l'Académie d'une "contribution" rédigée en décembre dernier à la mission Sicard. Dans cette contribution, il récusait très clairement l'idée même d'euthanasie.

Dans son dernier avis, le Conseil de l'Ordre invoque un "devoir d'humanité". Partagez-vous cette préoccupation ?

Bien entendu! Notre contribution rédigée en décembre dernier dénonçait déjà l'idée d' "obstination de soins". Pour autant, la loi Léonetti votée par le Parlement en 2005 se suffit largement à elle-même, car elle prévoit clairement que, dans une situation de fin de vie, le médecin ne doit pas faire preuve d'un "acharnement déraisonnable".(...)

Quels sont, alors, vos points de désaccord avec le Conseil de l'Ordre?

Ils tiennent essentiellement au fait que, dans une même phrase, le Conseil met sur le même plan des "agonies prolongées" et "des douleurs psychologiques incontrôlables".

Or, les premières correspondent à une situation de fin de vie où la mort est déjà proche et dans laquelle il n'existe pas de traitement susceptible de guérir le patient. Et c'est justement le rôle d'un médecin que d'accompagner son maladie jusqu'au bout.

En revanche, les douleurs psychologiques évoquées renvoient à la notion d'"arrêt de vie", ce qui n'est pas du tout la même chose. C'est la porte ouverte au suicide médicalement assisté. Et il n'entre pas dans la mission du médecin de provoquer délibérément la mort.

Au fond c'est une querelle de mots...

Sur cette question, les mots sont essentiels. L'enjeu n'est pas purement sémantique, il est à la fois déontologique et juridique. Voilà pourquoi je suis gêné à la lecture de ce document de l'Ordre(...). La loi Léonetti définissait un cadre général, elle prévoyait la possibilité de laisser des "directives anticipées", pas toujours connues certes, mais prévues. Et le Conseil de l'Ordre ouvre à nouveau la confusion.

Le Conseil de l'Ordre ne parle pourtant que de "situations exceptionnelles"

Mais justement! Qui va définir le côté "exceptionnel"? Va-t-on devoir établir une liste exhaustive? Et qui va s'en charger? Le législateur, l'Ordre, le Comité national d'éthique, la "formation collégiale" mentionnée par le Conseil? Ces interrogations sans réponse me laissent très inquiet.

Source : L'Express