Grosse promotion de l'euthanasie des déments à la télévision
Du blog de Jeanne Smits :
La chaîne de télévision néerlandaise VARA, « social-démocrate » et « progressive », vient de diffuser un documentaire sur l'euthanasie des déments, véritable outil de propagande pour la reconnaissance des testaments de vie et pour le droit de chacun de choisir la sortie si certaines conditions sont réunies : ne pas reconnaître ses enfants, par exemple, ou encore devoir être placé dans une maison de soins en raison de l'avancement d'une maladie dégénérative...
L'émission « Zembla », intitulée « Docteur, j'ai le droit de mourir ? » s'appuie notamment sur un sondage auprès de 10.000 membres d'une des plus importantes organisations de « séniors » aux Pays-Bas, ANBO : 76 % d'entre eux, assure-t-on au cours de l'émission (mais je n'ai pas trouvé ce résultats de l'enquête) désirent être euthanasiés s'ils deviennent déments.
Si c'est exact, s'agit-il du résultat d'une longue campagne sur le terrain de la NVVE (association néerlandaise pour une fin de vie volontaire) ? Quoi qu'il en soit, l'émission Zembla cherche à mettre en évidence ce que la vie dans un état de démence a d'insupportable, en montrant qu'aux Pays-Bas, les médecins refusent dans leur immense majorité d'euthanasier une personne qui n'est pas en mesure d'exprimer librement et consciemment sa propre volonté. Et ce même si elle a pris la précaution de l'exprimer dans le cadre d'un testament de vie détaillant les conditions nécessaires pour qu'on puisse procéder à sa mise à mort alors qu'elle ne pourrait plus la demander librement et personnellement.
Incroyable réquisitoire contre ces médecins qui n'en font qu'à leur tête, le programme, diffusé mercredi dernier, donne la parole aux proches de personnes démentes qui ne savent pas comment vivre avec les souffrances de ceux qu'ils aiment et qui s'indignent : les malades sont incontinents, n'ont aucune qualité de vie, ne voient pas leur désir pourtant clairement exprimé honoré au moment où ils sont enfermés dans des institutions. C'est au fond la souffrance des proches qui est exploitée pour justifier la pression. Vers la 35e minute de l'émission on voit ainsi l'épouse d'un malade qui se porte bien, mais qui se perd lorsqu'il sort, essayer de le convaincre qu'il est malade alors qu'il affirme qu'il va très bien. L'épouse brandit ses testaments de vie réclamant l'euthanasie ; lui explique qu'il ne veut en aucun cas mourir. Elle raconte comment elle appelle le médecin dès qu'il exprime de nouveau un désir de mourir... Pour le voir répondre, dès que le médecin accourt et lui demande comment il va : « Formidablement bien ! »
Il ne semble pas qu'en fait cette épouse désire faire éliminer un mari devenu encombrant : elle n'a aucune envie d'aller contre sa volonté. Mais on sent le désarroi d'une personne organisée face à une situation qui était pourtant bien ficelée par le testament de vie...
Ce que cherche à prouver l'émission, c'est qu'il est important soit de se laisser éliminer avant d'être tellement à l'ouest que toute décision lucide devient impossible, soit de faire pression pour la reconnaissance du testament de vie pour le moment où aucune décision lucide n'est plus possible. En l'état actuel de la pratique néerlandaise, l'euthanasie pour les personnes en voie de devenir démentes est acceptée par les commissions de surveillance et de contrôle qui donnent leur avis a posteriori. D'où les déclarations répétées d'un médecin de maison de soins, Bert Keijzer, qui recommande aux gens de se dépêcher de se faire euthanasier pendant qu'elles ne sont pas encore trop démentes, de manière à ce que le médecin puisse en toute conscience s'assurer de bien faire ce qu'elles veulent à ce moment-là : « Si vous ne voulez pas devenir dément, il faut, préventivement, alors que vous êtes encore en assez bon état, mettre fin à votre vie, explique-t-il. Après ? Trop tard : il ne se sent pas d'euthanasier une personne démente dont la personnalité a changé et dont l'avis ne correspond peut-être plus à ce désir exprimé à ce testament de vie rédigé naguère.
Il exprime ainsi à sa manière – choquante, même aux Pays-Bas – le point de vue exprimé par l'équivalent de l'Ordre des médecins, le KNMG, dont les directives par rapport à l'euthanasie sont claires : on ne l'administre pas si la personne n'est pas consciente de ce qui se passe, et on la met assez à l'aise pour qu'elle puisse refuser le cocktail ou la piqûre lytique jusqu'au dernier instant.
Voilà déjà plusieurs années que la NVVE milite pour une autre interprétation de la loi, forte d'un cas d'euthanasie déjà ouvertement pratiqué sur une personne carrément démente et qui a été approuvée par la commission d'évaluation.
Le documentaire donne la parole à Els Borst, ancien ministre de la Santé qui avait porté victorieusement le projet de légalisation de l'euthanasie et qui explique aujourd'hui que l'intention du législateur était bel et bien d'autoriser la mise à mort des personnes démentes, l'exigence d'accord de la personne tombant dès lors que celle-ci aurait clairement exprimé sa volonté dans un testament de vie demandant une euthanasie future dès lors que certaines conditions seraient remplies.
La lettre de la loi lui donne raison ; la pratique médicale est autre et l'on comprend, à travers l'articulation de l'émission et l'indignation qu'elle fait naître devant l'idée d'éliminer les personnes en voie de devenir démentes « avant qu'il ne soit trop tard », que l'effort néerlandais porte désormais sur la prise en compte des testaments de vie.
Le KNMG a réagi à l'émission en déclarant que l'euthanasie est selon lui impossible dès lors que le patient est incapable de « communiquer », même en présence d'un testament de vie. Le communiqué de l'organisation professionnelle précise qu'en cas de démence avérée, le médecin n'a pas la capacité de déterminer si le malade souffre réellement de manière « insupportable » et qu'il ne peut donc que s'abstenir et faire son travail, qui est toujours d'« alléger la souffrance ». Mais son président, Lode Wigersma, reconnaît dans le même mouvement que la communication d'un patient dément peut être non-verbale, qu'on peut tenir compte des geste ou du « langage du corps ».
Des deux côtés, on met l'accent sur une nécessité : le devoir du médecin et du patient de parler, et de parler souvent, des désirs de celui-ci quant à l'euthanasie, afin que la demande soit claire, réitérée, et confirme l'éventuel testament de vie qui dans un tel processus prend une valeur accrue. Il faut aussi que la personne en parle souvent avec son entourage...
Dans ces conditions, les visites chez le médecin et les discussions familiales risquent de devenir de plus en plus macabres...
Source : leblogdejeannesmits.blogspot.fr