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La mort est une affaire spirituelle

Ce n’est pas un paradoxe, c’est une bonne nouvelle.
Le livre de Roseline de Romanet est beaucoup plus qu’un récit car elle nous partage ses intuitions nées de son expérience auprès de personnes en fin de vie à la Maison Médicale Jeanne Garnier à Paris.
Ce livre nous concerne tous ! Pourquoi ? Parce que, comme le dit le Père Sesboüé dans sa préface : ces pages « peuvent, même si votre vie n’est pas actuellement menacée, vous aider vous-même dans cet itinéraire qui est aussi le nôtre, à la fois unique et universel. » La mort, en effet, c’est habituellement toujours pour les autres et pour plus tard ! Rassurons-nous ! Ce n’est pas de parler de la mort qui la fait venir plus vite par contre, oser parler de la mort permet de vivre pleinement sa vie. Si le propre de l’homme est de se savoir mortel, sa beauté est bien de se savoir spirituel.

Qu’est-ce que le spirituel ? L’auteur le perçoit « comme le mouvement d’existence du sujet, comme ce souffle de vie qui l’anime et qui l’habite » et aussi comme « l’inspiration ou le mouvement intérieur d’une personne, c’est-à-dire ce qui l’appelle à vivre ». Nous y sommes en amont du religieux, au-delà du psychisme. Pour autant ce dynamisme n’est pas une abstraction ; il existe à travers les « besoins spirituels » de chacun, formalisés dans les années 1960, et sur lesquels s’appuie l’auteur pour nous exposer les cas représentatifs illustrant son récit. Mais si ce terme de « besoins » permet d’affirmer leur nécessité, il ne doit pas occulter que l’essence de « la spiritualité n’est pas de l’ordre du besoin ni même de la demande. Elle relève de l’ordre du désir et du désir quelquefois le plus secret, le plus caché ». Le spirituel est ce qui donne souffle à la vie, ce qui fait vivre.
Le but de l’auteur est aussi de montrer le danger d’une approche séquentielle de la personne (à savoir ses composantes physiques, psychiques, sociales et spirituelles) et de l’importance au contraire d’une prise en soin holistique et intégrale de la personne dans sa dimension spirituelle qui, loin d’en être seulement l’une des quatre composantes, en est l’âme et le cœur !

La perspective de la mort déclenche un flot de réactions émotionnelles, psychologiques, spirituelles… « Les mots de crise, de combat ne sont pas trop forts » ; « le besoin spirituel manifeste, en direction d’autrui, tout le travail intérieur par lequel un malade, se sentant menacé dans son unité et son intégrité, tente de les reconquérir. »
Dans la reconquête de son dynamisme de vie le malade doit être accompagné, soutenu par son entourage, ici des soignants, qui, eux aussi, disposant d’un souffle et d’une expérience spirituelle, sont prêts à rencontrer gratuitement, par humanité, le souffle du patient.

Soutenir un patient en fin de vie c’est « avant tout repérer son souffle (entendu comme sa dimension spirituelle) pour l’y rejoindre et l’accompagner », « pas tant de chercher à faire quelque chose de plus pour l’autre qu’à être en communion avec lui » ; « il s’agit pour le soignant d’une attitude, d’une qualité d’être spirituelle, pleine du souffle apportant avec lui l’ouverture, l’attention, la discrétion, la présence, la délicatesse par respect pour tout ce que le patient vit et que nous ne connaissons pas ».

L’accompagnement requiert de se mettre au diapason de celui qui souffre, de le rejoindre et de cheminer avec lui. « Il ne s’agit surtout pas de le guider, sûrs de notre compétence. » Nous avons à laisser le patient « mener le jeu » et élire son accompagnateur.

Le sujet en fin de vie est le plus souvent habité par :
1- Le désir d’être reconnu comme sujet et dont il faut respecter la dignité.
2- Le désir de quête de sens et de relire son existence, même à travers la révolte, dans la vérité, et l’alliance des deux souffles de l’accompagné et de l’accompagnant
3- Le désir de lien, de relation à l’autre, de réconciliation, besoin d’être écouté (renvoyer sans interprétation et souligner ce qui fait sens).
4- Le désir de s’ouvrir à la transcendance et parfois même au divin ; même non croyant un soignant peut avoir une présence profondément spirituelle à l’autre.

L’auteur appelle « éthique du care (sollicitude) » la réponse à ces désirs : c’est en libérant la parole que le corps va être lieu de surgissement de la dimension spirituelle, et jointe à la compétence, passant du « faire des soins » au « prendre soin », le care soulage le malade.

Schématiquement l’éthique du care présente quatre phases :

1- « Caring about » : se soucier de, attention, disponibilité, vigilance.
2- « Taking care of » : responsabilité.
3- « Care giving » compétence.
4- « Care receiving » : réaction autonome du soigné et évaluation.

Mais ce déroulement n’a rien d’abstrait, et ces quatre facettes forment la trame de la parabole du Bon Samaritain (Luc 10, 25-37) qui se montre le prochain de l’autre par la manière dont il exerce le soin, « l’esprit du soin ». Cette parabole devient ainsi le lieu d’une spiritualité aconfessionnelle dans laquelle absolument toute personne, elle-même spirituelle par nature, peut trouver appui et enseignement pour un accompagnement désireux de prendre en compte cette dimension incontournable qu’est le spirituel chez toute personne en fin de vie.

Le soin véritable se vit comme une alliance de l’émotion qui saisit (sollicitude), de la compétence qui soulage (care), et de la présence qui réconforte (accompagnement).

Ce livre ne nous propose pas un savoir ou des recettes ; il nous invite à être constamment attentifs à notre propre souffle, notre propre vie spirituelle afin de pouvoir percevoir plus finement les désirs spirituels des personnes en fin de vie, désirs rarement exprimés comme tels !
Réfléchir l’accompagnement des personnes en fin de vie nous convoque incessamment à la vérité de notre propre vie jusqu’à ce dernier acte de liberté que nous poserons à l’heure de notre mort.
Oui, le propre de l’homme est de se savoir mortel. La beauté de l’homme est de se savoir spirituel. Osons le dire, osons le vivre à ce niveau de profondeur pour nous et pour tous nos proches.

Roseline de Romanet

Source : anf.asso.fr