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Des médecins poursuivent leur lutte contre l'euthanasie

le samedi 11 mai 2013

Explications d'Olivier Bachand

Des médecins poursuivent leur lutte pour empêcher la légalisation de l'aide médicale à mourir, notamment avec une campagne publicitaire choc.

Les opposants à l'euthanasie se sont réunis à Montréal samedi pour demander au gouvernement de Pauline Marois d'abandonner son projet de loi encadrant cette pratique, qui doit être déposé dans les prochaines semaines.

Même si seuls les patients atteints d'une maladie incurable pourraient s'en prévaloir, un groupe de médecins s'y oppose farouchement. Pour eux, cette pratique ne doit pas faire son entrée dans les hôpitaux, même si la population québécoise est majoritairement d'accord.

« Ce n'est pas un endroit approprié pour donner la mort à quelqu'un. Si on ne veut pas faire autrement et qu'on doit créer une maison pour ça, bien qu'on le fasse, mais qu'on ne le fasse pas dans le système de santé publique », estime le docteur Patrick Vinay, directeur des soins palliatifs au CHUM.

Dans une campagne publicitaire, ces médecins assimilent l'aide médicale à mourir au meurtre.

Le ministre déléguée aux Services sociaux et à la Protection de la jeunesse, Véronique Hivon, affirme que le « souci » du gouvernement est de « répondre à la volonté des gens d'avoir un accompagnement pour leurs souffrances en fin de vie ».

Les opposants à l'aide médicale à mourir vont continuer de faire pression sur le gouvernement Marois. Une pétition circule en ce moment et une manifestation est prévue la semaine prochaine devant l'Assemblée nationale.

Source : RadioCanada

 

 

 

 

Tuer n'est pas un soin

MONTRÉAL, le 5 mai 2013 /CNW Telbec/ - La campagne de publicité Tuer n'est pas un soin bat actuellement son plein dans les grands médias québécois.

Les organismes Vivre dans la Dignité et le Collectif de médecins du Refus Médical de l'Euthanasie ont joint leurs efforts afin de sensibiliser la population aux risques inhérents à une légalisation de la mort provoquée par un médecin. Le gouvernement du Québec prévoit actuellement légaliser « l'aide médicale à mourir », ce qui n'est en réalité rien d'autre que l'euthanasie.

Les 500 médecins et autres membres de ces deux regroupements expriment leur profond malaise face à l'éventualité d'un tel projet de loi.

Ils affirment qu'avec les possibilités de la médecine moderne il n'y a aucun besoin d'euthanasie pour soulager les patients en fin de vie.

L'expérience des pays où l'euthanasie est légale démontre également que des dérives graves sont inévitables et mettent en danger les personnes les plus vulnérables de notre société.

 sites Internet : www.vivredignite.com  et www.soignertoujours.com

Source : CNW Telbec

 

 

C'est pas moi, c'est mon confrère !

Aline TERLINDEN (étudiante)

La clause de conscience est un droit fondamental de toute personne travaillant dans le milieu médical. Dans un domaine ou l'on touche de si près à la mort, donc au sens de la vie, comment pourrait-on ne serait-ce qu'imaginer l'absence d'une telle clause, l'absence de cette liberté fondamentale de ne pas participer à un acte provoquant la mort?

Pourtant, sans avoir l'air d'y toucher, la nouvelle proposition de loi veut la modifier: le "médecin-objecteur" serait désormais obligé de communiquer le dossier à un médecin favorable à l'euthanasie pour assurer la continuité des "soins".

Or une objection n'est jamais posée à la légère. Le médecin qui la pose ne le fait pas juste pour "se sentir bien". Il le fait parce qu'il estime que l'acte est en contradiction avec ses convictions les plus essentielles. Le médecin se met en danger en objectant, car cela n'est pas "bien vu" dans les services hospitaliers.

S'il pense que l'enjeu est assez important pour se mettre en danger au niveau professionnel, il est inhumain de lui imposer de faire les démarches pour le patient, de "refiler le sale boulot" au collègue.

Le contraindre à agir de cette façon serait insulter sa démarche pourtant courageuse. La future loi lui imposerait en réalité de prendre une place dans la chaîne qui conduit le patient à l'euthanasie. Ce n'est pas parce qu'il n'effectuera pas l'étape ultime qu'il n'y aura pas participé.

On se fiche finalement bien de la conscience du médecin. On vante la liberté comme étant le bien suprême de l'homme, on réclame à grands cris la "liberté" de chacun à pouvoir demander la mort, mais qu'est devenue la liberté du médecins ? Elle semble être sacrifiée pour la prétendue liberté d'un autre. L'état, par cette loi, va-t-il se donner cette toute puissance de déterminer que la liberté d'un citoyen prime sur celle d'un autre?

Source : Euthanasie Stop

 

 

par Prof. Alexandre PERSU, Chargé de cours UCL, Chef de Clinique St Luc, Euthanasie Stop, 30/04/2013

Une transgression en entraîne une autre.

La dépénalisation de l'euthanasie a été largement justifiée par le respect de l'autonomie intégrale du sujet, supposée s'étendre au droit de mettre fin à une vie devenue un fardeau insupportable. Dans cette optique, le médecin est le garant de cette autonomie, et devient l'exécutant de cette volonté. Il est incité à violer le serment d'Hippocrate « par humanité » et à administrer une mort sans douleur, sinon sans souffrance à celui qui la réclame.

L'extension de ce qui devait être l'« exception d'euthanasie » aux patients atteints de démence, aux enfants mineurs ou aux grands prématurés, c'est-à-dire à des personnes ne jouissant pas encore ou plus de leur pleine autonomie met gravement à mal cette justification.

A moins que l'absence d'autonomie ne les exonère du statut de personne et donc des garanties que des siècles de civilisation chrétienne ont fini par associer à la personne humaine, même la plus faible et la plus démunie (l'«Habeas Corpus ») ?

Qu'on le veuille ou non, c'est déjà le principe qui sous-tend la dépénalisation de l'avortement : en déniant au fœtus son statut de personne humaine, on résout la contradiction sinon insoluble entre le droit de la femme à « disposer de son corps » et celui de l'enfant à ...vivre. Après cela, étendre l'euthanasie aux grands prématurés ou aux enfants n'ayant « aucune chance de survie » à la naissance n'est qu'une différence de degré.

On est moins habitué à raisonner de la sorte pour les personnes ayant atteint l'autre rive de l'existence. Il est plus difficile d'administrer la mort à ceux que nous avons aimés dans la plénitude de leurs facultés qu'à un enfant encore à naître que seule la mère peut-être a eu l'occasion de connaître dans un mystérieux dialogue muet.

Est-on suffisamment naïf pour croire que les intérêts des familles et les pressions du politique désireux de réduire le coût des soins de santé ne pèseront en rien dans les décisions d'euthanasie chez des patients incapable d'exprimer leur volonté ?

Les pauvres, les étrangers, les êtres sans famille que nos progressistes font profession de défendre tant qu'ils peuvent encore déposer un bulletin dans l'urne: voilà les premiers candidats à l'euthanasie. En l'absence d'interlocuteur la discussion ne sera pas longue. Ne voit-on pas qu'il y a là un risque de discrimination intolérable ?

Pis encore, l'élimination des grands prématurés et celle des déments pourraient devenir la règle plutôt que l'exception, inaugurant ainsi une barbarie hautement technicisée inédite dans l'histoire.

Mais voilà, en acceptant la dépénalisation de l'avortement puis de l'euthanasie, nous avons-nous-mêmes posé sans le savoir les jalons qui nous conduisent au seuil de transgressions nouvelles. Aucun obstacle conceptuel ne nous empêche plus de poursuivre dans cette voie.

Et si les raisonnements ne suffisent pas, les media sont là pour prendre en otage notre sensibilité et orienter notre libre arbitre en mettant en scène des situations médicales et humaines à la limite de l'insoutenable pour nos contemporains déshabitués du spectacle de la souffrance.

Gageons que seule une minorité de ceux qui, émus par la détresse des femmes, ont milité pour le droit à l'avortement étaient favorables à l'euthanasie et que beaucoup de ceux qui ont marqué leur accord pour la dépénalisation de l'euthanasie croyaient avoir définitivement- ou au moins pour longtemps- mis d'accord la loi et la pratique médicale.

Il est encore temps de s'opposer à ce rouleau compresseur qui, au nom de "l'exception d'humanité" bouleverse tous les principes d'humanité.

Il est toujours temps.

Source : Euthanasie STOP

 

 

par Charles-Henri d'Andigné, famillechretienne.fr, 11/02/2012

Directeur de l'unité de réanimation de La Pitié-Salpêtrière à Paris, le Pr Louis Puybasset estime que la loi Leonetti offre des repères pour la fin de vie. A l'approche de la présidentielle, il l'explique dans son livre : Euthanasie, le débat tronqué (Calmann Lévy, 15 février 2012). Démonstration.

Une loi méconnue

Le premier dirige depuis douze ans l'unité de neuro-réanimation chirurgicale de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris, où il est confronté quotidiennement aux décisions d'arrêt des thérapeutiques actives chez ses patients. Pour lui, le débat sur l'euthanasie est « tronqué », dans la mesure où les « citoyens n'ont pas les clés pour l'aborder avec justesse ».

Les raisons ? La confusion qui règne, l'émotion qui déferle à chaque affaire, et au final, la méconnaissance des véritables enjeux.

Méconnaissance de la loi, tout d'abord. Or, la loi Leonetti, votée en 2005, offre des repères tant aux soignants qu'aux patients et à leur famille. En introduisant dans le droit français la notion d'« obstination déraisonnable », cette loi « protège les malades contre l'acharnement thérapeutique et le risque d'être assujetti aux choix du seul médecin ». Et les auteurs de raconter le cauchemar vécu par la famille de Jean-Jacques à qui une équipe médicale, de sa propre initiative et sans en référer à quiconque, a greffé un cœur. Contre l'avis de sa femme et de sa mère, qui ne demandaient qu'une chose : qu'on le laisse partir en paix. La loi oblige à consulter la famille, mais celle-ci l'ignorait et les médecins ont passé outre.

Soins palliatifs et dignité

Le livre le souligne à l'envi : ce n'est pas l'euthanasie qui est l'alternative à l'acharnement thérapeutique, mais les soins palliatifs. Mais, là encore, qui le sait ? La loi de 1999, confirmée par la loi Leonetti, précise que « toute personne malade dont l'état le requiert a le droit d'accéder à des soins palliatifs et à l'accompagnement. Les soins palliatifs sont des soins actifs et continus pratiqués par une équipe interdisciplinaire, en institution ou à domicile. Ils visent à soulager la douleur, à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la dignité de la personne et à soutenir son entourage ».

La dignité, tiens, parlons-en. C'est l'argument massue des partisans de l'euthanasie, qui soulignent que la dignité ne saurait être qu'une notion subjective. Et que, dans ces conditions, si j'estime que ma dignité est atteinte, j'ai le droit de mettre fin à mes jours. Les auteurs citent le philosophe Luc Ferry : « L'idée même qu'un être humain puisse perdre sa dignité parce qu'il serait faible, malade, vieux et par là même dans une situation d'extrême dépendance est (...) une idée intolérable sur le plan éthique ».

Quelques pistes proposées

Intolérable et surtout dangereuse, comme le rappelle Fabrice Hadjadj : « Il est très facile de susciter chez quelqu'un le sentiment qu'il n'est plus "digne". En particulier au sein d'une société dévorée par l'efficience, le jeunisme, le spectaculaire... ».

Les auteurs proposent quelques pistes intéressantes en conclusion : développer la formation aux soins palliatifs, renforcer les droits des malades, favoriser la médiation en cas de désaccord... Les différents candidats sauront-ils s'en inspirer ?

On pourra reprocher à ce livre, ici ou là, des prises de position discutables, par exemple le refus d'associer la question de l'euthanasie à celle de l'avortement, alors qu'il s'agit, en dernière analyse, du même sujet, celui du respect de la vie. De même, la préface de l'ex-ministre Claude Evin, qui se veut à égale distance entre pro et anti-euthanasie, laisse-t-elle à désirer. Ce livre n'est pas écrit dans une perspective chrétienne et cela se sent. Cela ne l'empêche pas d'être fort éclairant, tant pour ceux qui croient au Ciel que pour ceux qui n'y croient pas.

Charles-Henri d'Andigné

Source : Famille Chrétienne

 

 

par Prof. Chantal LEFEBVRE, Prof. Médecine Interne, clinique St Luc, 12/04/2013

L'interdit du meurtre est au fondement de toute société.

Ce fondement a été profondément ébranlé dans notre pays par la promulgation, en 2002, de la loi dépénalisant l'euthanasie.

Cette autorisation légale de l'euthanasie revenait à écrire dans la loi que certaines vies humaines, marquées par la maladie physique ou psychique, avaient perdu leur valeur, leur dignité. Elle voulait faire croire que l'euthanasie était la solution pour mourir dans la dignité quand les souffrances étaient intolérables, la maladie incurable, comme si la mort naturelle était indigne.

Or, la dignité de l'homme est inaltérable, elle est la même dans chaque phase de sa vie, depuis sa conception jusqu'à sa mort, en pleine santé comme gravement malade, qu'il soit conscient ou comateux, car elle est inhérente à son être même, elle lui a été donnée par Dieu.

Une fois l'interdit de tuer levé, il était inévitable que le sens de la transgression disparaisse petit à petit, que le geste euthanasique se banalise et que son extension à de nouvelles catégories de personnes soient demandées.

La loi de 2002 fut une brèche dans la digue interdisant tout meurtre. Les flots d'une culture de mort s'y sont engouffrés. De nouveaux pans de la digue sont prêts à tomber dans les prochains mois : 13 propositions d'extension tous azimuts de la loi sont en cours d'examen actuellement. Jusqu'où laisserons-nous ces flots mortifères envahir notre société ? Bientôt, des catégories entières d'individus, faibles, handicapés, vieux, non rentables, à charge des autres, coûteux pour la société, seront éliminés, légalement, sous prétexte que leur vie ne vaut plus la peine d'être vécue. Ce n'est pas de la science-fiction, c'est à nos portes.

Il est temps de réveiller nos consciences. Oui, tout être humain est intrinsèquement digne, parce qu'il est homme, et non par la qualité de sa vie ou par le regard que portent les autres sur lui.

Une demande d'euthanasie est en réalité un SOS lancé par une personne souffrant profondément : douleurs physiques intolérables, angoisse devant la mort imminente, impression d'être devenu inutile, une charge pour autrui, manque d'affection, d'écoute, abandon même des proches qui ne supportent pas la dégradation physique ou psychique de l'être cher, peur de soins disproportionnés...

Répondre à cet appel à l'aide, à ce cri de souffrance en éliminant tout simplement le souffrant, même à sa demande, est une attitude indigne et inhumaine, c'est cautionner son impression d'inutilité, c'est le priver de l'affection ultime tant désirée. La seule réponse humaine est l'accompagnement avec compassion de la personne en détresse, et non son élimination . Accompagner veut dire assurer le meilleur confort possible , non seulement par la mise en place de traitements appropriés qui soulagent les maux physiques et psychiques, mais aussi, et c'est au moins aussi important (ma pratique hospitalière l'expérimente au quotidien) en donnant de son temps pour écouter avec empathie, apaiser, encourager et soutenir le souffrant. Ainsi entouré, avec affection, par la famille d'abord (qui parfois fuit dans ces circonstances difficiles et peut, par cette attitude d'abandon, être responsable de demande d'euthanasie) par les soignants, les médecins, les psychologues, les ministres du culte s'il le souhaite, le souffrant, le mourant pourra vivre jusqu'au bout, avec dignité et sérénité.

C'est cette culture d'amour qu'il faut réintroduire dans notre société.

Source : Euthanasie STOP

 

 

Sédation, euthanasie, suicide assisté : et si on arrêtait de tout mélanger ?

par Dr Bernard Devalois, 26/02/2013 (extraits)

Après le rapport Sicard sur la fin de vie, c'est au tour de l'Ordre des médecins de se prononcer en faveur du droit à une sédation qui accélère la mort dans les situations difficiles de fin de vie. S'agit-il d'une forme d'euthanasie? François Hollande a saisi le Comité consultatif national d'éthique de cette question. Pour le Docteur Bernard Devalois, chef de service de médecine palliative (CH René Dubos, CH Pontoise), il est urgent de comprendre de quoi on parle et d'appliquer la loi Léonetti sur la sédation palliative.

Le rapport Sicard remis au Président de la République en décembre dernier et la récente prise de position du Conseil national de l'Ordre des Médecins ont semé un certain trouble. Une clarification de ce qui se cache derrière le mot sédation est donc indispensable pour comprendre les enjeux du débat autour de l'assistance médicalisée à la fin de vie. Le terme de sédation est flou. Il peut en fait désigner des actions médicales très différentes, notamment dans leurs implications éthiques. Il faut impérativement distinguer entre l'utilisation de traitements à visée sédative pour soulager un malade en fin de vie, et l'utilisation de sédatifs pour faire perdre conscience à un malade, jusqu'à la survenue de sa mort, à sa demande et alors qu'il n'existe pas d'indications médicales.

Des implications éthiques très différentes

Dans le premier cas, il s'agit d'agir sur des symptômes d'inconfort réfractaires (c'est à dire qu'on n'arrive pas à soulager). La démarche est purement bientraitante. Elle ne vise pas à provoquer la mort du patient mais à la rendre moins insupportable. Elle est toujours proportionnée à la souffrance qu'elle soulage — elle peut être suspendue ou maintenue uniquement la nuit par exemple. D'autre fois il peut être décidé de la maintenir jusqu'à la mort, pour des patients dont la mort est inéluctable et chez qui on ne peut être sûr qu'il n'y a pas de symptômes d'inconfort. C'est le cas chez certains patients cérébrolésés en réanimation ou chez des nouveau-nés, notamment quand on arrête des traitements qui maintiennent artificiellement en vie. Les textes réglementaires français ont entérinés cette pratique en 2010.

Même s'il existe un risque d'accélérer la survenue du décès, cette sédation palliative est légale (article 2 de la loi de 2005) et légitime (conformément aux recommandations professionnelles). Elle ne pose pas de problèmes sur le plan éthique. C'est même sa non-mise en œuvre qui pourrait être considérée comme de la maltraitance. Lorsqu'un patient conscient et en toute fin de vie demande à être endormi en raison de tels ou tels symptômes, y compris une détresse psychique, il est du devoir des professionnels d'y apporter une réponse adaptée et proportionnée.

Mais d'autres utilisations de la sédation sont possibles. Jusque dans les années 80 c'était une pratique courante que d'accélérer la mort des patients considérés comme en fin de vie. Un mélange de produits, détournés de leur usage thérapeutique, était explicitement nommé « cocktails lytiques ». Désormais ces pratiques –sans aucune information et sans aucun consentement – ont disparu (on l'espère en tout cas !).

Mais le recours aux sédatifs plongeant un patient dans un coma profond jusqu'à la mort, sans que cela ne soit justifié par l'existence d'un symptôme réfractaire, est une pratique loin d'être exceptionnelle actuellement. Il s'agit alors, puisque la sédation n'est plus proportionnée à la souffrance, d'un surdosage volontaire. Et donc d'une manière indirecte d'accélérer la survenue de la mort sous couvert du terme de « sédation terminale», qui évite de parler d'euthanasie lente. Notons qu'aucun pays au monde n'a donné aux médecins le droit de pratiquer de telles sédations euthanasiques, qui sont donc pratiquées clandestinement.

Si la sédation devenait un droit du patient (comme il y a un droit du patient de refuser tout traitement), cela poserait encore d'autres questions. La création d'un tel droit – que certains évoquent ouvertement – serait (contrairement à la sédation à visée palliative) une forme de légalisation des injections létales. Cette sédation à la demande du patient serait bien le moyen lui permettant d'obtenir une assistance à son intention suicidaire. Il s'agirait donc bien d'une forme de droit à l'euthanasie similaire à ce qui est légalisé dans les pays du Benelux. Au nom de la prééminence de l'autonomie de décision du malade, elle s'imposerait au médecin sans que celui-ci ne puisse s'y soustraire.

Du droit à la sédation au droit au suicide...

Le droit à la sédation à la demande est donc un des moyens possibles du droit au suicide. Mais la liberté du suicide n'implique pas un droit au suicide entendu comme un droit à créance (un droit à une assistance au suicide par l'Etat).

Certains considèrent que la liberté individuelle du suicide repose sur la décision et que sa réalisation peut être déléguée à un tiers — cette réalisation peut alors être confiée par la loi aux médecins. C'est ce qui a été légalisé dans les pays du Benelux, et c'est ce qui serait légalisé par un droit à la sédation. Mais on pourrait aussi imaginer d'impliquer d'autres catégories professionnelles, voire créer un nouveau métier !

D'autres, au contraire, considèrent que la mise en œuvre du suicide ne peut être séparée de la décision, et qu'aucun tiers ne peut être autorisé ou mandaté à mettre en œuvre pour autrui ce geste intime. La création d'un droit au suicide passe alors par la fourniture, dans des conditions strictes, des moyens pharmacologiques du suicide à ceux qui remplissent les conditions fixées, en les laissant réellement libres de l'utiliser ou non. C'est le choix qui a été fait en Oregon. Cette autre piste, plus respectueuse des droits individuels, donne des garanties indiscutables, puisque c'est le patient qui s'administre le produit.

Si en tant que médecin je n'ai pas d'avis à donner sur les choix de société qui seront faits en matière de droit au suicide, j'ai tout au moins un avis de citoyen. Et je pense qu'une société qui donne aux uns les moyens de se suicider aura du mal à lutter contre le suicide des autres. Comment à la fois promouvoir le suicide assisté, et faire campagne contre le suicide des jeunes ou des personnes âgées. ? Le modèle libertarien me paraît aller à l'encontre d'une société solidaire des plus vulnérables. Plutôt qu'aider les gens à se suicider, nous devons les aider à ne plus en avoir le désir.

La France est le seul pays à avoir légiféré, dans la loi Leonetti, en 2005 puis en 2010, sur la possibilité de la sédation palliative. Loin d'être en retard, nous avons donc déjà un dispositif intelligent et novateur. Cela n'empêche pas de réfléchir sereinement à ce qui pourrait l'améliorer : en favorisant et en développant la sédation palliative, et en combattant la sédation euthanasique.

Source : La Vie

 

 

Prendre la défense de la vie ... mais aussi la défense du médecin !

par Dr Benoît BEUSELINCK, Médecin oncologue, 28/02/2013

Depuis 2002, l'euthanasie est, sous certaines conditions, dépénalisée en Belgique. Je fais partie du groupe chaque fois grandissant de médecins qui estiment que cette loi apporte plus de problèmes qu'elle n'en résout.

Point n'est besoin de citer la Bible ou l'une ou l'autre encyclique ; mon argumentation peut se baser entièrement sur une observation scientifique/empirique. En effet, le seul "avantage" de cette loi, c'est qu'elle a transformé notre pays en un laboratoire où l'on peut voir au-delà des considérations philosophiques et dans la réalité de la pratique quotidienne les changements profonds de mentalité et les aberrations qu'une pareille loi peut induire en dix ans.

Rappelons-nous que cette loi a initialement été promue sous le prétexte de donner au médecin dans des situations extrêmes de souffrance physique (douleurs, angoisses, asphyxie, délires) – et donc dans des situations assez rares – les moyens d'intervenir pour soulager ces souffrances, soit en provoquant volontairement la fin de la vie du malade, soit en essayant de contrôler les symptômes, même si, en même temps, par son acte, il raccourcit la vie de façon involontaire, et ce sans encourir le risque d'être poursuivi par la loi pour homicide volontaire.

Il est clair qu'en 2012, cette loi connaît une application beaucoup plus large. Dans les médias ont paru récemment des articles évoquant l'euthanasie de personnes dépressives, des deux frères jumeaux craignant de devenir aveugles, d'un auteur souffrant des premiers signes de la maladie d'Alzheimer. Les promoteurs de la loi eux-mêmes se réjouissaient par ailleurs du fait que la mort par euthanasie de deux Belges connus avait mis davantage au premier plan la possibilité de l'euthanasie, mais ils regrettaient que, après une augmentation transitoire, le nombre de demandes d'information concernant l'euthanasie ait à nouveau diminué (De Standaard 21/5/2008, "Euthanasie kent Claus-effect"). Nous ne nous trouvons donc clairement plus dans les conditions extrêmes où le médecin est dos au mur face à une situation qui s'impose à lui, mais dans un contexte où on veut "lever le tabou" sur des demandes d'euthanasie "sous-jacentes" et "refoulées".

L'euthanasie est donc clairement invoquée pour résoudre non pas des situations de souffrance physique extrêmes, mais des situations de souffrance physique, qui sont en outre assez communes. Il s'agit de personnes qui ne sont pas confrontées à une souffrance physique aiguë incontrôlable, mais qui éprouvent des difficultés à donner un sens à leur maladie et qui perdent le courage de vivre. D'autres font un pas de plus et invoquent le droit à l'euthanasie au nom de l'autonomie de la personne. Plutôt que d'être confrontés à des problèmes de souffrance physique, nous nous trouvons tout à coup face à des problèmes d'ordre philosophique, métaphysique, voire religieux. C'est la question du sens de la vie, du sens de la souffrance et de l'autonomie de la personne humaine.

La médecine palliative peut parfaitement contrôler la douleur physique, l'asphyxie, les angoisses et la plupart des autres symptômes de souffrance physique. (...) Par contre, la médecine est-elle apte et appelée à répondre à la question du sens de la vie, du sens de la souffrance et de l'autonomie de la personne humaine, et encore plus à offrir la mort comme solution à ces problèmes ?

Il me semble qu'il appartient aux psychologues, aux philosophes, aux prêtres, aux rabbins, aux imams, aux conseillers laïques, etc., de répondre à cette question. Un médecin n'a-t-il pas, au fond, entamé ses longues études afin de guérir les malades ? Sans doute un psychologue et un prêtre ou un philosophe pourront-ils aider davantage un malade à trouver un sens à sa souffrance et à faire face aux contraintes de toute vie humaine. (...)

Pourquoi alors l'indication de l'euthanasie ne pourrait-elle pas plutôt être décidée par les psychologues, philosophes, prêtres, rabbins, imams et conseillers laïques ? Et peut-être même mise en œuvre par ces professions ? L'acte en soi n'est pas compliqué et ne demande pas de qualifications spéciales. (...)

Source : Euthanasie STOP

 

 

L'euthanasie comme aveu de l'incompétence médicale ?

par Catherine DOPCHIE, Oncologue, 19/03/2013

Les soins palliatifs sont tellement efficients que même les partisans de l'euthanasie disent que ne pas savoir soulager les souffrances physiques est aujourd'hui de l'incompétence médicale. L'euthanasie est donc surtout appliquée pour des souffrances de perte du sens de la vie telle qu'elle est. L'euthanasie est désormais banalisée, et certains déclarent, contrairement à l'esprit de la loi, qu'elle n'est plus ni une exception, ni une transgression éthique mais un accompagnement en douceur proposé pour éviter toute souffrance inutile, sans attendre un délabrement physique ou psychique insupportable. La demander est présenté comme un acte courageux, la pratiquer, comme un acte empli d'humanité.

La confusion ne s'arrête pas là. On présente la pratique euthanasique comme un choix libre, cela ne tient pas compte du terrain. Il s'agit plutôt de l'impasse dans laquelle se retrouve le patient qui n'a pas appris à intégrer sa nature humaine limitée et a réduit son être à sa sensibilité, à ses sensations. Il se croit dans l'incapacité d'intégrer ses richesses et ses pauvretés pour viser une unification de son être, source de guérison. Il réduit sa personne à sa souffrance et réduit le médecin à sa fonction. Il ne s'agit plus de « soigner toujours » en faisant un bout de chemin fraternel où l'on partage son impuissance, tout en découvrant qui l'on est vraiment dans cet échange; mais un lien particulier où le souffrant met en lumière la gravité de son mal, où les deux parties sont centrées sur ce dernier en lui donnant toute la place, pour se convaincre qu'il est insurmontable et doit être maîtrisé. Le médecin qui vise plutôt la santé de l'Homme et refuse de pratiquer l'euthanasie, perd la liberté de s'impliquer dans une relation d'alliance thérapeutique qui engage deux personnes en situation de fragilité. Il se retrouve dans l'impasse d'opposer un droit de conscience à un droit de créance.

La souffrance est subjective, non mesurable. Le fait qu'il s'agisse parfois de l'anticipation de celle-ci n'est déjà plus une difficulté. Au médecin est confié la tâche de reconnaître que la souffrance est réellement insupportable, qu'elle justifie de tuer dans le cadre de la loi. Exiger cela du médecin est lui donner un pouvoir plus dangereux encore que dans les décisions où il pourrait y avoir acharnement thérapeutique : celui de se croire capable d'évaluer la souffrance humaine. En devenant expert, il pourra donc se passer de la plainte actualisée de la personne âgée démente, et pourquoi pas de celle du nourrisson... Dans des situations de fin de vie, où l'activité psycho spirituelle est intense, des personnes changent complètement d'avis au sujet de leurs désirs. Des études scientifiques sur la qualité de vie des malades oncologiques démontrent que les items relevés comme signifiants pour la qualité de vie changent avec l'aggravation de la situation et la perte d'autonomie. Il n'est donc pas raisonnable de penser que l'on puisse être compétent sur le ressenti que l'on aura dans une situation dans laquelle on n'est pas encore. Si la déclaration anticipée de demande d'euthanasie est à durée illimitée pour la perte de conscience de soi, l'euthanasie sera pratiquée sur base du document, sans connaître le vécu de la personne à ce moment là. Il s'agit plus là d'idéologie que de soulagement d'une souffrance.

La psychologie du mineur, qui n'a pas la maturité de l'adulte, me semble peu solide pour éviter l'écueil d'une fausse liberté, surtout dans la société matérialiste actuelle. L'on sait par expérience qu'il est possible d'évoluer et traverser sa souffrance. Mais, comme pour d'autres apprentissages, le jeune a besoin d'être témoin du cheminement d'adultes souffrants pour trouver son chemin. Or, puisque toute personne a le droit de refuser des soins, qu'ils soient curatifs ou de confort, à condition d'avoir été éclairée et que les soins palliatifs sont désormais étiquetés d'acharnement par certains, il perdra confiance. Les progrès encore à faire pour optimiser l'accompagnement psychosocial et spirituel sont et seront étouffés dans l'œuf, car seul celui qui souffre peut nous mettre en demeure de compassion. Les soignants deviendront de plus en plus incompétents et donc intolérants. L'émerveillement qui émeut devant la dignité de celui qui souffre en Homme debout, devient dénigrement pour celui qui ne sait pas comment se comporter. L'euthanasie est une manière technique de prendre en compte la souffrance humaine. Peut-on vraiment considérer qu'il s'agisse d'un progrès ?

Le vulnérable, que ce soit l'enfant qui fait tout pour éviter à ses parents de souffrir à cause de lui, ou le vieillard qui ne veut pas être un fardeau pour ses proches, a tout à perdre du constat de nos incapacités, nos insuffisances de temps, de finances, de compassion...mais il n'est pas le seul !

Je donne mon avis à titre strictement personnel, en tant qu'oncologue, formée aux soins palliatifs et responsable d'une unité de soins palliatifs.

Source : Euthanasie STOP

 

 

Motion contre la banalisation de la mort en Belgique

La Société Médicale belge de saint Luc asbl. veut exprimer son point de vue concernant la discussion au Sénat belge sur l'extension de la loi sur l'euthanasie envers les enfants et les personnes en état de démence.

La prédiction que la loi sur l'euthanasie du mois de mai 2002 nous amènerait sur une pente glissante quand on renonce au commandement "Tu ne tueras pas" se confirme: l'opinion publique et les responsables politiques désirent une extension de la loi sur l'euthanasie pour les enfants et les personnes en état de démence. Les médias y collaborent activement.

Après dix ans d'application de la loi sur l'euthanasie, aucun cas n'a été retenu comme non conforme aux exigences de la loi***, preuve d'une interprétation molle de cette loi.

Ceci a été prouvé par surcroît en janvier 2013 par l'euthanasie des jumeaux sourds-muets Verbessem.

On a l'intention d'étendre les semaines prochaines cette loi vers les enfants et les personnes en état de démence. Allons-nous déraper vers des situations où un adolescent avec un diabète du type I trouve à un certain moment que sa qualité de vie devient insuffisante et qu'il puisse demander une euthanasie ?

On ne conçoit pas que l'autodétermination ne peut pas évoluer vers un déterminisme extrême de la personne !

La notion de qualité de vie est une notion extrêmement subjective. Il y a quelques mois, nous puissions voir à la VRT (télévision flamande) comment des malades atteints de la maladie de Alzheimer s'amusaient agréablement entre eux, pour eux la qualité de vie avait une toute autre expression.

Le fait qu'en Hollande (avec 16 millions d'habitants) aucun cas d'euthanasie d'enfants n'a été signalé les deux dernières années, prouve que cette loi est inutile, on ne promulgue pas des lois pour de grandes exceptions !

Est-ce qu'on ne conçoit pas que nous ne pouvons pas évoluer vers un situation dans le genre : « vous demandez, nous tournons ! »

Au nom de la Société Médicale belge de Saint Luc / Belgische Artsenvereniging Sint-Lucas, vzw.

Dr. Paul Deschepper, président d'honneur

*** alors que celle-ci n'est pas respectée comme en témoigne le faible nombre de déclarations (inférieur à 50% d'après certaines études

Source : Fédération Internationale des Associations de Médecins Catholiques

 

 

Euthanasie : l'acharnement législatif

De la vie solidaire à la mort solitaire

de A. et J.-F. Roseau, étudiants en médecine et en affaires publiques (Paris VII-Diderot et Sciences Po Paris), 15 mars 2013

Depuis la publication du rapport Sicard en décembre 2012, les débats sur une éventuelle dépénalisation de l'euthanasie s'étaient faits plus discrets, rapidement relégués à l'arrière de la scène médiatique par le mariage pour tous. Mais les Français aiment trop se quereller sur des sujets d'éthique pour s'en tenir à cette unique réforme. Gageons que l'actualité des prochains mois ouvrira les vannes d'un débat animé.

La récente sortie du Conseil national de l'Ordre des médecins (CNOM), à travers un texte rendu public à la mi-février, ravive la question soulevée par la vingt-et-unième proposition du programme de François Hollande.


En tant qu'étudiants en médecine et en sciences politiques, et comme tout jeune concerné par l'avenir éthique et social et de la France, nous avons cru devoir exprimer notre opposition à toute forme d'euthanasie dite « active » et à l'aberration du suicide assisté.

L'assistance médicalisée pour la fin de vie – euphémisme maladroitement utilisé pour occulter une réalité que les commissions n'ont pas l'audace de nommer simplement l'assistance médicalisée pour la mort, donc, puisque c'est bien de cela qu'il s'agit, marque une étape majeure dans la résurrection d'un État tout-puissant auquel incomberait le droit de dire qui peut ou ne peut pas mourir, conformément à sa conception singulière, devenue absolue, de la dignité humaine.

Cette intuition explique en partie l'adoption d'un texte par le Conseil de l'Ordre qui, de peur d'être dessaisi d'un dossier engageant l'avenir de chaque médecin, a compris qu'il devait jouer son rôle.(...)

La politique a pour objet les conditions du vivre-ensemble, et non du mourir-assisté. Quant aux lois, elles demeurent l'expression générale d'une volonté portant sur des cas généraux. Évidemment, personne ne veut souffrir. À juste titre, l'opinion publique s'est laissée fortement impressionner par des situations exceptionnelles ayant bénéficié d'un très large écho médiatique. Mais, au-delà de la compassion, il entre un peu d'irresponsabilité dans l'idée qu'on puisse confier à d'autres, à la demande, la tâche d'abréger ses souffrances. On ne légifère ni avec des affects, ni avec des peurs.

Dans son premier constat, le Conseil de l'Ordre rappelle qu'il existe depuis 2005 une loi répondant efficacement à la majorité des cas. En proscrivant l'acharnement thérapeutique, la loi Leonetti traduit la volonté du corps médical d'accompagner dignement les derniers jours d'un patient sans franchir le pas définitif – moralement fragile et socialement dangereux – de l'euthanasie. Le rapport Sicard aura beau bâtir des distinctions spécieuses entre mort et fin de vie, suicide et mort volontaire, accompagnement et complicité, il s'agit bel et bien de donner la mort. L'Ordre des médecins réaffirme ainsi son attachement à la loi Leonetti et encourage sa promotion massive auprès des soignants et de l'opinion. Garde-fou aux dérives possibles de l'euthanasie, cette loi (Léonetti) permet d'articuler deux phrases majeures du serment d'Hippocrate : « Je ne prolongerai pas abusivement les agonies » et « je ne provoquerai jamais la mort délibérément ».

D'après le même rapport Sicard, la légalisation de l'euthanasie ferait l'objet d'une « revendication très largement majoritaire » portée par plus de 80 % de la population. Face à l'argument du nombre, nous constatons qu'un tel mouvement traduit non seulement un abandon de responsabilité au profit des pouvoirs publics, mais manifeste surtout un changement radical dans la perception de la vie humaine et des rapports sociaux. Au lieu de prendre ces chiffres pour argent comptant, mieux vaudrait diagnostiquer une pathologie collective. Le vrai problème, à notre sens, réside principalement dans la solitude profonde qui entoure les mourants. « Penser solidairement la fin de vie », le titre du rapport dégage une amère ironie quand on conçoit que c'est précisément une crise de solidarité qui nous amène aujourd'hui à prendre au sérieux la dépénalisation de l'euthanasie. Dans les années 1970, le sociologue Norbert Elias décrivait déjà ce symptôme social plus que pathologique de l'abandon généralisé où se tient l'agonie des mourants.

Pour que ce terme d'agonie ne perde pas son sens originel – celui d'une lutte ultime et courageuse contre la mort -, il faut considérer qu'elle se vit à plusieurs, dans l'accompagnement familial et social, plutôt que dans l'isolement sordide de mouroirs institutionnalisés. Cet argument fait peur. Le temps presse, coûte cher et, comme l'écrit François Hollande au professeur Sicard, les familles ne « sont plus toujours en capacité d'assister leur proche ». Nos vieux sont un fardeau, un phénomène qu'une administration cynique pourrait ajouter à la longue liste des éléments parasites et chronophages ! C'est donc, au premier chef, la responsabilité des familles, enfants et parents confondus, et celle du corps social dans son ensemble, qu'il s'agit de promouvoir hic et nunc en arguant d'un thème aujourd'hui à la mode : « la solidarité des générations ». À en croire certains, ce thème ne relève apparemment plus du bon sens le mieux partagé. Quant aux malades incurables, est-ce à la collectivité de dire qu'ils peuvent mourir ? Est-ce aux médecins d'administrer la mort ? La revendication d'une clause de conscience suffit à démontrer les failles de ce projet.

De fait, la place qu'occupe aujourd'hui la question de l'euthanasie révèle surtout les vices d'une société où les malades éprouvent douloureusement le poids de leur présence. (...) Ce n'est pas d'une aiguille qu'ont besoin les mourants, mais d'une main cramponnée à la leur.

Que les familles se chargent d'honorer leurs parents jusqu'à la déchéance pour qu'elle n'en soit plus une ! C'est uniquement dans le regard des autres que le patient s'éteindra avec dignité, pas sous les néons glauques d'une salle dédiée aux séances d'injection létale.

Nous n'ignorons pas qu'une éventuelle légalisation de l'euthanasie ne concernerait pas exclusivement les personnes âgées. Mais, dans les faits, elles représentent la part majoritaire des cas visés par le dispositif. Développons les infrastructures ! Apaisons les souffrances ! Garantissons à tous la dignité du soin ! Il y a déjà tant à faire de ce côté. Quand bien même il vous en prierait courtoisement, on ne pousse pas un mourant dans l'escalier. Même en fermant les yeux.

Sommes-nous prêts à voir émerger dans les hôpitaux des lieux consacrés au suicide ? Imagine-t-on de demander à d'autres le droit de mourir au risque de voir sa requête rejetée ? A-t-on conscience des risques et des dérives encourus par des individus déjà fragilisés par les effets de la maladie ?

La balance penche bien trop du côté des méfaits potentiels ou réels pour que nous puissions reconnaître la nécessité de cette loi. Ce n'est pas hypocrisie, mais bon sens de reconnaître que le rôle de l'État a des bornes. N'oublions pas que nos prédécesseurs ont tout fait pour soustraire à l'instance publique le droit de vie et de mort sur chacun. Ce n'est pas pour le lui redonner aujourd'hui sous l'impulsion de nos angoisses. Ne créons pas, sans le vouloir, les conditions d'une mort planifiée déléguée au pouvoir. Et pour finir sur ce degré suprême d'intervention du politique dans la sphère privée, dernier rempart de liberté individuelle, nous emprunterons à Balzac l'expression de son étonnement face à un risque qui nous guette : « Je ne savais pas que la bureaucratie pût allonger ses ongles jusque dans nos cercueils. »

Source : causeur.fr

 

 

Dix ans d'euthanasie : un heureux anniversaire ?

La Libre Belgique, mis en ligne le 13/06/2012 (extraits)

L'euthanasie est-elle la manière appropriée de rencontrer la souffrance des personnes en fin de vie ?

Dix ans après la dépénalisation de l'euthanasie en Belgique, il nous semble important de réfléchir à cette question. Partons d'un constat : des soins médicaux appropriés, un accompagnement psychologique et une présence aimante aux côtés du malade suppriment souvent la demande d'euthanasie. Il arrive un moment où les traitements curatifs deviennent inutiles et sources de désagréments disproportionnés par rapport aux bénéfices escomptés. Tout le monde s'accorde aujourd'hui pour dire qu'ils doivent être arrêtés pour ne pas tomber dans l'acharnement. Par contre, il faut continuer et intensifier les soins d'accompagnement et de confort, c'est-à-dire les soins palliatifs. Ceux-ci favorisent une authentique mort dans la dignité, tout en évitant d'abréger délibérément la vie. De très nombreux professionnels de la santé et bénévoles accompagnent la vie finissante avec une persévérance qui force l'admiration. Jour après jour, rejetant toute forme d'acharnement thérapeutique, ils mobilisent les ressources de plus en plus efficaces de la médecine actuelle pour soulager et rendre supportable la douleur physique. Par leur écoute, leur professionnalisme et leur générosité de cœur, ils apaisent le malade et le soutiennent jusqu'à son dernier souffle de vie. La présence de la famille et des proches est elle aussi essentielle.

En des moments particulièrement intenses, nombreux sont ceux qui ont découvert qu'au lieu de donner la mort, il est plus beau et gratifiant de donner de la qualité de vie jusqu'au bout. Sans aucun doute, toute demande d'euthanasie doit être écoutée et reçue avec compréhension. Nous mesurons en effet l'extrême gravité et le poids de ces situations angoissantes où le patient n'en peut plus. Mais la société doit-elle nécessairement accéder à cette demande ? Une telle demande est souvent un appel à l'aide. A cet appel, et il faut le redire avec force, la seule réponse appropriée est de soutenir le désir de vivre qui se manifeste dans toute expression d'une demande de mort. (...)

L'euthanasie est souvent revendiquée comme l'ultime liberté : celle de pouvoir choisir l'heure et la manière de sa mort. Toutefois, remarquait récemment Luc Ferry, elle fait peser sur le médecin la charge de procurer cette mort. On se retrouve ainsi confronté au paradoxe d'une liberté qui met en lumière l'absence d'autonomie de l'individu par le besoin qu'il a d'autrui pour mourir. L'euthanasie est donc loin d'être une affaire purement individuelle.C'est ce qui distingue l'euthanasie de la "liberté" du suicide qui, tout en interpellant la société, ne reçoit pas son aval et n'engage pas le corps médical.

L'autorisation légale de l'euthanasie a quant à elle un impact sur le tissu social et sur notre conception sociétale de la médecine. Elle transgresse un interdit fondateur et affecte en cela même les bases de notre démocratie, en délimitant une classe de citoyens à qui on peut donner la mort avec l'aval de la société. Dès lors qu'elle revêt une indéniable dimension sociopolitique, l'euthanasie peut être légitimement récusée au nom d'intérêts publics supérieurs : la sauvegarde des fondements de la démocratie et la protection de la spécificité de la médecine, connue depuis toujours comme l'"art de guérir", et non comme l'art de faire mourir.

Notre propos est largement attesté par les faits : l'euthanasie dégrade la confiance au sein des familles et entre les générations; elle instille de la méfiance à l'égard des médecins; elle fragilise les personnes les plus vulnérables qui, sous l'effet de diverses pressions, conscientes ou inconscientes, peuvent se croire moralement obligées d'exprimer une demande d'euthanasie.

En dépénalisant l'euthanasie, la Belgique a ouvert une boîte de Pandore. Les dérives envisagées il y a dix ans sont aujourd'hui devenues une réalité. (...) Comme il était prévisible, une fois l'interdit levé, nous marchons à grands pas vers une banalisation du geste euthanasique. Force est de constater que, paradoxalement, plus une société refuse de voir la mort et d'en entendre parler, plus elle se trouve encline à la provoquer.

Dix ans après la dépénalisation de l'euthanasie en Belgique, l'expérience atteste qu'une société faisant droit à l'euthanasie brise les liens de solidarité, de confiance et d'authentique compassion qui fondent le "vivre ensemble", et en définitive se détruit elle-même. (...)

Collectif de professionnels

Dr B. ARS, président de la Société médicale belge St-Luc; Prof. J.-M. AUWERS (UCL); Dr Ph. BALLAUX, Dienst Hartchirurgie, Gent; Dr B. BEUSELINCK, oncologue, UZ Leuven; Prof. O. BONNEWIJN (IET, Bruxelles); V. BONTEMPS, présidente de l'Arche, Bruxelles; J-M. CHARLIER, coordinateur de l'ASBL Emmanuel Adoption; Prof. L.-L. CHRISTIANS (UCL); Dr G. de BETHUNE, pédiatre, membre du Conseil national de l'Ordre des médecins; Dr I. DE BOCK, médecin en soins palliatifs, Bruxelles; Prof. em. H. DE DIJN (KULeuven); Prof. em. A. de HEMPTINNE, Faculteit Geneeskunde, UGent; Prof. J.-P. DELVILLE (UCL); Dr C. DENEYER, Bruxelles; Prof. P.-A. DEPROOST (UCL); Dr A. de RADIGUÈS, pédiatre, Bruxelles ; Dr P. DESCHEPPER, Belgische Artsenvereniging St-Lucas; Prof. em. L. de THIBAULT de BOESINGHE, oncologue, UGent; Dr J.C. DEVOGHEL, directeur hre., Centre douleur CHU, Liège; Prof. T. DEVOS, hématologue, UZ Leuven; Prof. Chr. de VISSCHER (UCL); Dr X. De WAGTER, cardiologue, Gent; Prof. Ph. de WOOT (UCL); Prof. ém. X. DIJON (FUNDP); Dr C. DOPCHIE, oncologue, Tournai; Dr Th. FOBE, Bruxelles; Dr P. FORGET, anesthésiste-réanimateur, UCL) ; Dr M. FRINGS, médecin spécialisée en soins palliatifs; Prof. M. GHINS (UCL); W. HANCE, pasteur à La Louvière; Dr C. HENDRICKX, Charleroi ; Prof. J.-M. HENNAUX (IET, Bruxelles) ; Prof. X. HERMAND (FUNDP) ; Dr Ph. HERMANNS, Gent; Prof. L. ISEBAERT (UCL) ; Dr Ch. JANNE d'OTHÉE, pédiatre, Bruxelles; M. Mustafa KASTIT, imam et théologien; Prof. D. LAMBERT (FUNDP); Prof. Baudouin LE CHARLIER (UCL); Prof. Ch. LEFEBVRE, (UCL); Dr Th. LETHÉ, Bruxelles; Prof. I. LINDEN (FUNDP); Dr P. LOVENS, Bruxelles; Dr J.-B. LINSMAUX, Psychiatre; Prof. D. LUCIANI (UCL); Prof. S. LUTTS (UCL); M. Yacob MAHI, professeur de religion islamique; Prof. A. MATTHEEUWS (IET, Bruxelles); Prof. J. MENTEN, radiothérapie-soins palliatifs, UZ Leuven; Prof. F. MIES (FNRS-FUNDP); Prof. E. MONTERO (FUNDP); X. MULLER, philosophe; Prof. D. MANICOURT, Cliniques univ. St-Luc, Bruxelles; J. PAUTUT, pasteur à Mons; Prof. A. PERSU, Cliniques univ. St-Luc (UCL); Dr Th. PHILIPS, cardiologue, UZ Leuven; Dr K. PEDERSEN, neurologue (Erasme); Prof. H. REYCHLER, Cliniques univ. St-Luc (UCL); Prof. L. RIZZERIO (FUNDP); Prof. ém. H. SIMONART (UCL); Dr. A. SEGHERS, gynécologue; Désirée SEGHERS, juriste; Prof. B. STEVENS (UCL); R. STOCKMAN, médecin dans la santé publique, Generale Overste van de Broeders van Liefde; Dr. M. STOENOIU, chef de clinique adjoint, Cliniques univ. St-Luc, Bruxelles; J.-Cl. THIENPONT, pasteur de l'Eglise protestante d'Ixelles; Dr M. THOMEER, pneumologue, Genk; Prof. R. TROISI, Ghent University Hospital Medical School; Prof. ém. L. VAN BUNNEN (UCL); Dr P. VAN EYKEN, anatomopathologiste, Genk; Prof. ém. D. van STEENBERGHE (KULeuven); Dr P. VUYLSTEKE, Oncologue, Namur; H. WOUTERS, orthopédagogue, membre du directoire de l'European Association for Mental Health in Intellectual Disability.

Source : La Libre Belgique

 

 

par Véronique Demers
Publié le 2 Mars 2013

«L'euthanasie contrevient à mes valeurs, mais aussi au Code criminel canadien», souligne le Dr Marc Bergeron, médecin au CHU de Québec Hôpital de l'Enfant-Jésus.

 

Confronté quotidiennement à la mort, le Dr Marc Bergeron souhaite freiner le projet de loi québécois sur l'euthanasie – aussi nommé aide médicale à mourir – des patients atteints de maladies très graves et irréversibles, qui sera adopté d'ici la fin juin.

Le médecin en hémato-oncologie au CHU de Québec Hôpital de l'Enfant-Jésus juge que la très grande majorité des patients peuvent être soulagés avec la science moderne, et que l'aide médicale à mourir existe déjà sous forme de soins palliatifs.

«De plus, tous les soins connexes devraient être gratuits et faire partie de l'assurance-maladie du Québec, comme l'acupuncture, des massages thérapeutiques et de l'aide psychologique. C'est la voix à privilégier», souligne-t-il.

Un médecin de Québec organise une manifestation le 9 mars

Le Dr Bergeron croit que le sujet n'a pas été débattu suffisamment, c'est pourquoi il invite tous les citoyens contre l'euthanasie à manifester le 9 mars devant l'Assemblée nationale. «Je suis inscrit au Collectif des médecins du refus médical de l'euthanasie; la manifestation du 9 mars est une démarche personnelle», a précisé le médecin résidant à Sainte-Foy.

Le médecin du CHU de Québec fait remarquer que les partis politiques étaient unanimement en faveur de la proposition de la Commission mourir dans la dignité, lors du dépôt en mars 2012, malgré l'avis d'experts et du fait que plus de 50% des gens qui venus en commission parlementaire étaient contre.

Intégrité personnelle menacée

Le Dr Bergeron croit que la loi – si elle est adoptée – risque d'être dangereuse à long terme. «Le fait de permettre l'euthanasie au Québec n'aidera pas la cause du suicide qui est un problème de société très grave au Québec. On favorise la mort», avance-t-il.

L'euthanasie contrevient aux valeurs personnelles du Dr Bergeron, mais aussi au Code criminel canadien. «Le gouvernement québécois veut contourner le Code criminel canadien, en permettant l'euthanasie dans un cadre réglementaire bien précis. Ça signifie que le procureur du Québec pourra décider de ne pas poursuivre le médecin ou l'infirmière qui procèdera dans les règles, mais tant que le Code criminel canadien ne sera pas amendé, l'euthanasie restera un crime», explique-t-il.

«Tant que le Code criminel canadien ne sera pas amendé, l'euthanasie restera un crime» -

«Toute ouverture à cette loi-là menace à court, moyen ou long terme mon intégrité personnelle. On ouvre la porte à toutes sortes d'inclusions de malades. Je ne me sens pas rassuré», poursuit le médecin.

Administration lourde

Selon Marc Bergeron, plusieurs dérapages surviennent notamment en Belgique, où l'euthanasie est légalisée depuis 10 ans. «Les médecins ne déclarent pas tous les cas d'euthanasie, alors qu'ils sont obligés de le faire dans un registre régional. Un médecin qui omet de déclarer l'euthanasie peut être poursuivi, mais en réalité, les médecins délinquants ne sont pas poursuivis», souligne-t-il.

Toujours en Belgique, le nombre de décès par euthanasie représente un faible pourcentage selon les dernières statistiques, soit 0,5%. «C'est un petit nombre de personnes qui requièrent une administration lourde», conclut le Dr Bergeron.

Source : Québec Hebdo

 

 

Extrait de l'article de Richard Boudes, 28/02/2013

Rémi Penchinat, médecin généraliste nîmois et président de l'Association pour le développement des soins palliatifs (ASP) dans le Gard, affirme qu'en 26 ans de carrière, il n'a jamais été confronté à un patient lui réclamant de l'aider à mourir. Opposé à la légalisation de l'euthanasie, il estime que les conditions créées par la loi Leonetti sont suffisantes, parce qu'elles "instaurent la parole du patient et obligent les soignants à prendre en charge la douleur, y compris si cela entraîne la survenue de la mort".

Le manque de moyens pour les soins palliatifs à domicile

L'association qu'il préside fait la promotion de toute action en faveur des soins palliatifs et forme des accompagnants bénévoles. "Commençons par développer les soins palliatifs puis tirons-en des conséquences", tranche le médecin qui met l'accent sur les inégalités en France dans l'accès aux soins palliatifs, les insuffisances en Languedoc-Roussillon notamment, ou encore le manque de moyens pour les soins palliatifs à domicile. Sur le plan éthique "clairement opposé au geste léthal", le docteur Penchinat avance, au nom de l'ASP, que "dans la très grande complexité des cas, la tentation d'une réponse simple, nous paraît dangereuse", la légalisation de l'euthanasie ouvrant "la porte aux dérives". "Une société qui répond à la plus grande détresse de cette façon-là, c'est inquiétant."

Source : Midi Libre

 

 

Dr André Bourque
L'auteur est médecin et professeur agrégé au département de médecine familiale de l'Université de Montréal et chef du département de médecine générale du CHUM.Une centaine de médecins appuient sa position, qui résume les principaux éléments d'un mémoire qui a été remis au Collège des médecins du Québec le 31 août dernier.

Le débat sur la dépénalisation de l'euthanasie du suicide assisté ne cesse de ressurgir au Canada et au Québec.

Sur le sujet de la maladie débilitante et de la mort, la préoccupation première de la majorité est de se voir soulagé de la douleur et des malaises, et bien entouré. Les patients qui expriment le désir de mourir le font le plus souvent parce qu'ils ont besoin de réconfort, qu'ils sont déprimés, ou que leurs douleurs et leurs symptômes ne sont pas bien contrôlés.(...) La demande à mourir est une sorte de cri du coeur qui représente le plus souvent un appel à la sympathie.

Faire mourir le patient n'est pas une solution humaine pour soulager les situations dramatiques de douleur ou de souffrance terminales: le médecin a toujours le devoir et le pouvoir de faire mourir la douleur, et non pas de faire mourir le patient.

Il est considéré une bonne pratique médicale et même une obligation d'utiliser les opiacés et tout l'arsenal analgésique disponible dans l'intention d'apaiser le plus possible la douleur du malade, même si c'est au prix d'abréger ses jours par les effets secondaires de la médication (ce qui est très rarement le cas). Les avancées de la thérapeutique et de l'organisation des soins de la médecine palliative des 30 dernières années ont été remarquables et sont aussi prometteuses pour l'avenir. Il n'y a pas de limites imposées au médecin lorsqu'il met en oeuvre les moyens pour soulager la douleur ou qu'il décide avec le consentement du patient de cesser des traitements jugés futiles ou disproportionnés.

Il y aura toujours dans nos sociétés des personnes atteintes de maladies terminales ou dégénératives sévères, qui voient venir les complications ou la durée de leur maladie, qui bénéficient de beaucoup de support et de soins mais qui voudraient mettre fin à leurs jours en un temps et un lieu, et qui ne sont pas capables de le faire seules.

Ces personnes ne sont pas nécessairement déprimées et ne voient plus de sens à ce qui leur reste à vivre naturellement.(...) Ces personnes doivent être entendues et aidées à trouver un sens à la vie qui reste, plutôt que de trouver un raccourci vers la mort.

La liberté et l'autonomie de la personne s'arrêtent là où elles empiètent sur celles des autres membres de la société. Une modification de nos lois pour satisfaire la demande d'un tout petit nombre d'individus dans la société mettra en péril la vie d'un beaucoup plus grand nombre, qui n'étaient pas visés. L'expérience des quelques pays qui se sont aventurés dans cette voie démontre que les pratiques deviennent ingérables malgré la mise en place de contrôles et de balises : les protocoles ne sont pas respectés, les consentements non obtenus, les pressions des familles fortes et difficiles à gérer. Des personnes qui ne le demandaient pas sont mises à mort.

  (...) L'euthanasie deviendra une issue thérapeutique vers laquelle des personnes se tourneront pour soulager leurs souffrances, alors qu'il y a beaucoup d'autres options.

Il en résultera des pressions indues sur les personnes âgées, celles ayant des handicaps sévères, ou recevant des traitements coûteux: elles apprendront subtilement qu'elles représentent un fardeau pour la société. Il y aura des retentissements défavorables sur les attitudes sociales envers la personne âgée ou débilitée. La personne n'est pas indigne du fait qu'elle dépend des autres ou connaît une déchéance physique ou psychologique. La solution pour assurer le « mourir dans la dignité » demeure dans l'approche palliative compétente, le respect, l'accompagnement et la tendresse.

La dépénalisation de l'euthanasie et du suicide assisté repose entièrement sur une participation de la profession médicale : c'est le médecin qui est appelé à porter un jugement sur l'utilité de préserver la vie ou d'y mettre fin. Pour donner un « droit à la mort » au patient, on doit donner un « droit de tuer » au médecin. Il s'ensuit une érosion de la relation médecin-patient : le médecin n'est plus seulement celui qui guérit, soulage ou réconforte, mais aussi celui qui donne la mort. La mise à mort devient une « option thérapeutique » de la profession médicale. Cela érode le lien de confiance envers toute la profession médicale.

Bien que le suicide soit parfois revendiqué comme une liberté, il demeure avant tout un drame personnel fondamentalement contraire à la nature humaine et un échec de la société. Le suicide n'est jamais sans retentissement sur les autres personnes et sur toute la société. La réponse face à la personne qui veut se suicider a toujours été qu'on lui vienne en aide: elle doit le demeurer.

Source La Presse

 

Pays-Bas : face à l’euthanasie, des médecins-conseil réagissent

par Institut Européen de Bioéthique, 26/08/2016

Une étude réalisée auprès des médecins SCEN (Steun en Consultatie bij Euthanasie in Nederland, c'est-à-dire Soutien et Consultation pour une euthanasie aux Pays-Bas) traduit le fait que, selon la majorité de ces médecins-conseil, beaucoup d’euthanasies seraient pratiquées parce que la personne qui la demande n’aurait pas bénéficié d’une prise en charge adéquate.

Le Dr Es Adriaan exprime ainsi l’avis de plusieurs de ses confrères SCEN qui mettent en question la qualité et l’accessibilité des soins palliatifs pour tous aux Pays-Bas. Le malaise est perceptible pour ces médecins qui posent clairement la question du filtre palliatif avant que ne soit accordée une euthanasie : a-t-on vraiment tout proposé à la personne avant d’accéder à sa demande de mort ? Ne recourt-on pas trop vite à l’euthanasie ? Le docteur Adriaan, rejoint par Paul Lieverse, spécialiste de la douleur, réclame un investissement significatif dans le développement des soins palliatifs, notamment à domicile.

D'après une évaluation du SCEN (2010) de l'institut du VU et l'AMC, il ressort que « 60 % des médecins SCEN ont vécu une situation dans laquelle les soins palliatifs faisaient défaut ». Ce rapport souligne le problème posé par les soins palliatifs insuffisants, constituant un élément déclencheur d’une demande d'euthanasie. « Il y a quelque temps, j'allais beaucoup plus loin en ce qui concerne les conseils en vue d’une euthanasie, mais maintenant, je conseille le recours à une équipe de soins palliatifs ; cela doit être beaucoup plus ancré dans la pratique. », témoigne l’un de médecins interrogés.

Interpellé à la Chambre des Représentants sur la question, le Secrétaire d’Etat Van Rijn (1) souhaite susciter un débat.

Quel signal donnons-nous en tant que société lorsque nous ne réagissons pas au fait qu’une personne n’ait d’autre issue que de demander à être euthanasiée tout simplement parce qu’elle n’a pu bénéficier à temps de l’encadrement multidisciplinaire d’une équipe compétente de soins palliatifs ?


(1)    Brief staatssecretaris Van Rijn

Source :  ieb-eib.org    Medisch Contact, 16/06/2016