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Faut-il euthanasier le soldat Lambert ?

21/06/2018

Le sort de Vincent Lambert, patient lourdement handicapé des suites d’un accident de la route, est suspendu une nouvelle fois à une décision de justice. Pourquoi cet acharnement à vouloir mettre fin à ses jours ?

Depuis 2008, voilà 10 ans que Vincent Lambert, en état pauci relationnel, depuis son accident de moto, tient le coup. Pour un mourant, il est bigrement résistant et doté d’une pulsion de vie pour le moins tenace. D’autant qu’hospitalisé au CHU de Reims, il a fait l’objet de 4 procédures collégiales de fin de vie qui toutes, à l’exception de la troisième, ont conduit à une unique décision : il faut arrêter l’hydratation et l’alimentation du patient et le laisser mourir. La première, en mai 2013, a été mise en œuvre jusqu’à ce que ses parents, qui n’étaient pas informés, se rendent compte que leur fils, après 30 jours, était en train, au sens propre, de mourir de faim. La dernière en date du 9 avril de cette année invoque le motif d’une « obstination déraisonnable »[1].

Une histoire sans fin

Ce jour-là, malgré les avis du médecin conseil spécialisé dans l’accompagnement des patients en état pauci-relationnel, délégué par la famille, la quatrième procédure collégiale condamne une nouvelle fois Vincent Lambert à mort par la faim et la soif. Cette fois seulement, il sera sédaté. Cynique victoire brandie par les défenseurs de la loi Claeys-Leonetti. Dix jours plus tard, 70 professionnels de santé spécialisés dans ce type de pathologie s’insurgent dans une tribune dénonçant, sous couvert d’acharnement thérapeutique, un « abandon thérapeutique » et de la « maltraitance sur personne vulnérables »[2]. Et ils parlent publiquement, prenant position enfin dans une affaire suivie mais jusqu’ici abandonnée, pour que leur silence « ne devienne complice de la mort provoquée d’un de nos patients ». A leurs côtés, les avocats s’activent, déposent de nouveaux recours et les juges réinvestissent le tribunal. Bien embêtés les juges par la prise de position de ces soignants terriblement concernés. Ils tergiversent et finissent pas nommer trois « experts » qualifiés en neurologie, ou en médecine physique et de réadaptation. Ils devront déterminer, dans un délai d’un mois, si « le tableau clinique » de Vincent Lambert a évolué depuis 2014[3]. En fait d’experts, les médecins s’avèrent n’avoir aucune expérience de la prise en charge de ces patients. Les avocats repartent à la charge[4] mais les juges ne sont pas d’humeur[5]. Ils refusent de revoir leur copie jusqu’au nouveau coup de théâtre. 15 juin 2018, les experts nommés et confirmés par le tribunal administratif se désistent[6]. Ils conseillent des experts « aux compétences irréprochables » et estiment qu’un changement de structure s’impose à l’établissement d’un diagnostic serein du patient. En attendant, Vincent Lambert ne faiblit pas, témoignant d’une rage de vivre au moins égale à l’acrimonie de ceux qui lui ont depuis longtemps réglé son compte. Il y quelque chose de furieux dans cet affrontement qui engage à la fois un naufrage de l’éthique et un déni d’humanité. Le tribunal rappelé une nouvelle fois, hésite aujourd’hui avec nonchalance sur l’opportunité pourtant acquise d’une nouvelle expertise et envisage de statuer sans attendre sur la décision d’arrêt des traitements, alors qu’une vie se joue entre leur main[7].

Mais au nom de quoi finalement cet acharnement à faire mourir le patient Lambert ? En effet, grand handicapé, pauci-relationnel, le malade va bien. Le seul traitement dont il fait l’objet est une sonde qui l’alimente et l’hydrate. Enfin, un traitement… vous voyez, manger et boire, c’est quand même plutôt un soin de base, non ?

Alors ? Alors, il est vrai que l’intitulé de la loi Claeys Leonetti, qui a été adoptée le 2 février 2016, est ambigu : la loi créée de « nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie ». Des malades ? Des malades qui ne seraient pas en fin de vie ? Et pourquoi ? Quels traitements seraient pour eux « déraisonnables » ?

La volonté du patient

Si on se place du côté du patient, la question qui est souvent posée est celle de savoir si on peut avoir envie de vivre une vie comme celle-là ? La question mérite réflexion et elle n’est pas sans réponse. En effet, dans ce domaine, les sciences permettent des avancées pour le moins surprenantes. L’équipe du neuroscientifique Niels Birbaumer[8] du Wyss Center for Bio and Neuroengineering de Genève a cherché à savoir si des patients ayant perdu tous moyens de communiquer étaient toujours pleinement conscients et s’ils voulaient toujours vivre. Elle a trouvé la réponse en utilisant une interface entre le cerveau et l’ordinateur pour communiquer avec 4 personnes souffrant de sclérose latérale amyotrophique, complètement enfermées, ayant perdu la possibilité de tous mouvements volontaires. A la question « J’aime vivre », trois d’entre elles ont répondu « oui ». De même, elles répondent oui à la question « Êtes-vous heureux ? ». Le quatrième patient, une jeune femme de 23 ans, n’a pas répondu ouvertement à la question, ses parents craignant qu’elle ne soit dans un état émotionnel trop fragile.

Et il y a aussi le témoignage très actuel de Martin Pistorius[9]. Ce sud-africain de 43 ans a souffert d'un syndrome d'enfermement complet durant 12 ans. Au départ, les médecins ont indiqué à ses parents qu’il n’avait plus aucune activité cérébrale. Pourtant, en état végétatif, il se réveille et prend conscience qu’il est piégé dans un corps inerte jusqu’à la fin de sa vie. Un jour, il réussit cependant à faire un petit mouvement du haut du visage, ce sera le premier de nombreux autres. Il va retrouver l’usage du haut de son corps, réapprendre à communiquer grâce à un ordinateur, se marier… Aussi en l’état actuel des connaissances, la prudence devrait être de mise.

Un déni d'humanité

En attendant, Vincent Lambert est tenu sous clés depuis quatre ans, prisonnier dans sa « chambre » de l’hôpital de Reims, cloué sur son lit par un personnel médical qui ne fait pas l’effort de l’installer quelques heures par jour dans un fauteuil. Et depuis combien de temps le « soldat Lambert » n’est-il pas sorti de l’exiguïté des quatre murs de sa chambre d’hôpital ? Les visites sont par ailleurs parcimonieuses et surveillées. Pourquoi la kyné nécessaire à la stimulation de des fonctions endormies qui ne demandent qu’à se réveiller, il déglutit et pourrait être capable de s’alimenter, lui est-elle refusée depuis tant d’années ? Des soins de base dispensés habituellement à ce type de patient. Malgré tout, après toutes ces années, Vincent est toujours bien vivant… et la saga continue. Les médecins et les juges s’entêtent dans une besogne funeste que le bon sens ne comprend pas. Si le degré de civilisation d’une société se mesure au soin qu’elle prend des plus fragiles de ses membres, la nôtre a désormais largement de quoi interroger.

Plutôt que de décider arbitrairement de la mort de Vincent Lambert, est-ce qu’il ne serait pas préférable de lui permettre de rejoindre une maison spécialisée et de lui offrir les vrais soins dont il a besoin ? Et plus largement, faut-il supprimer ceux que la médecine n’arrive pas à guérir ? Qui peut s’arroger un droit aussi grave que celui de vie ou de mort sur son semblable ?