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Je veux être un médecin, pas un meurtrier!

par Andreia Cunha dos Santos Silva, Médecin généraliste, 04/06/2018

Alors qu'au Portugal, une majorité de députés ont rejeté les propositions de loi qui voulaient dépénaliser l'euthanasie, je ne peux manquer – en tant que médecin portugais, formé en Belgique et en Suisse, et actuellement en activité à Bruxelles – d'envoyer mon témoignage professionnel sur ce qui se pratique dans ces pays européens où l'euthanasie est déjà dépénalisée à certaines conditions « bien strictes. »

De nombreux patients m'ont déjà demandé de mettre fin à leur vie, souvent en dehors des conditions prescrites par la loi, et en plus aussi très souvent, je suis également confrontée à des familles qui souffrent de la maladie d'un proche et qui me demandent de l'euthanasier...

Durant ma spécialisation, j'ai suivi un patient qui était dans un état très avancé de sa pathologie oncologique. Très vite, cet homme est entré dans un coma irréversible, et son agonie (en médecine, on désigne par ce mot la période précédant le décès, qui, dans la plupart des cas, est sans douleur) a duré au moins trois jours. On m'a demandé – comme à toute l'équipe – comment je réagissais face à cette situation. Je tiens à souligner qu'il n'y avait pas d'obstination thérapeutique et que la douleur était traitée correctement. Cependant, puisque le patient n'était plus conscient, mais que son agonie était considérée par certains collègues comme trop longue, certains ont dit qu'il était nécessaire « d'aider ce patient à mourir ». Sachant très bien ce qui se passe dans tant d'hôpitaux belges, je n'ai pas été surprise. Heureusement, le patient a fini par mourir de mort naturelle, en présence des infirmières qui prenaient soin de lui !

Quelques années plus tard, j'ai eu affaire à un patient qui avait fait une demande d'euthanasie : il disait que sa souffrance était « insupportable ». Cela avait été « évalué » par deux collègues médecins. Le jour où cet homme devait choisir la date de son euthanasie, il a commencé à être désorienté et confus. Il n'a pas pu faire connaître la date qu'il avait choisie. Quelques jours après, le patient n'est plus confus. La discussion reprend avec lui, pour voir si le processus d'euthanasie devait se poursuivre.

Quand je lui ai demandé s'il maintenait sa demande d'euthanasie, ce patient m'a avoué qu'il ne voulait pas mourir, mais que les nombreuses douleurs qu'il ressentait lui étaient insupportables et que c'était pour cela qu'il demandait la mort. Je dois admettre que je ne m'attendais pas à cette réponse. Je partais du principe que, depuis le début, tout avait été fait pour atténuer la douleur. Je me suis rendu compte que son traitement n'était pas adapté à l'intensité des symptômes et, après l'ajustement thérapeutique, le patient a finalement retiré sa demande d'euthanasie et est retourné chez lui pour recevoir des soins palliatifs à domicile.

Ces épisodes que je rapporte aujourd'hui, parmi beaucoup d'autres, montrent clairement à quel point il est dangereux de dépénaliser des pratiques qui conduisent à la mort des patients : il est utopique de croire que l'on peut contrôler ces pratiques, que ce soit par les autorités ou par des commissions externes.

La récente controverse au sein de la Commission de contrôle de l'euthanasie en Belgique en est la preuve . Justifier la dépénalisation de l'euthanasie en affirmant qu'elle empêchera l'euthanasie clandestine et illégale, c'est une tromperie gigantesque.

Nous savons en Belgique, aux Pays-Bas et en Suisse que ce n'est pas le cas. Même les militants de l'euthanasie en Belgique disent haut et fort que le nombre d'euthanasies non sollicitées (et donc hors la loi) dépasse 1.000 décès par an.

Mais ce n'est pas tout...

Dans un article publié dans le journal Le Soir en 2014, le professeur Jean-Louis Vincent, président de la Société belge intensivistes, défend la possibilité de pratiquer des euthanasies sans l'accord du patient en les justifiant par le constat que, selon lui, de nombreux patients admis aux soins intensifs, s'ils s'en sortent, auraient une qualité de vie « médiocre ». Mais appartient-il au médecin de décider qui mérite de vivre et qui mérite de mourir ? C'est apparemment le cas dans nos hôpitaux belges...

Ceux qui connaissent bien le sujet de l'euthanasie et du suicide assisté ne sont pas surpris par ces dérives. Elles viennent d'une conception purement utilitariste de la fin de la vie, cachée derrière le dogme de l'autonomie du patient, à qui rien ne résiste quand elle se conjugue à la « qualité de vie ». Celle-ci est impossible à définir parce qu'elle est subjective et propre à chaque personne. De plus, ces lois de dépénalisation, même si elles sont restrictives, font admettre progressivement à la société et aux médecins que la mort provoquée est un droit du patient et qu'elle est simplement une proposition thérapeutique comme n'importe quelle autre. Alors qu'en fait l'euthanasie mine les fondements de notre pratique médicale et de notre « vivre ensemble ».

Malgré ces situations sérieuses auxquelles je suis confrontée depuis le début de ma carrière, j'ai pu travailler avec des équipes de soins palliatifs. J'ai pu apprendre comment faire face à la fin de la vie et à la souffrance d'un patient, comment prendre soin de lui et de sa famille. L'apparition des soins palliatifs en médecine provient en grande partie de l'interdiction de tuer, qui est constitutive de la médecine. Cela conduit de très nombreux professionnels de la santé à rechercher et à procurer les meilleurs traitements pour soulager la douleur physique et la souffrance morale des patients.

Cependant, dans une vision faussement « humaniste » du patient et de la médecine, certains veulent nous faire croire que la réponse la plus humaine que nous puissions donner à un autre être humain qui souffre est la mort, surtout s'il la demande. Il semble donc très facile, et certainement moins cher pour nos gouvernants d'avoir une loi pour permettre la mort des citoyens.

Et pour revenir au Portugal, il est maintenant urgent de réfléchir, d'instituer et de financer un réseau efficace de soins palliatifs. Car nous faisons face, dans mon pays, à une quasi-absence de ces soins. Et cela est inadmissible alors que les soins palliatifs ont été développés depuis des décennies et sont proposés par l'Organisation Mondiale de la Santé comme la seule façon de soigner et de suivre les patients en fin de vie.

Soutenir l'euthanasie et le suicide assisté au motif que l'on peut « mourir mal », quand les moyens pour un suivi adéquat des patients en fin de vie sont peu ou prou absents, est tout simplement insultant pour les Portugais et les professionnels de la santé ! L'eugénisme par l'élimination des personnes âgées, c'est aussi comme cela que cela se passe...

Aujourd'hui, je vous dis : Je ne veux pas être un meurtrier, je veux être un médecin !

Penser dès lors que le Portugal ne tombera pas dans les mêmes dérives que celles qui existent déjà dans les pays où l'euthanasie et le suicide assisté ont été dépénalisés, relève de la pure inconscience de la part de nos dirigeants. Ouvrir la porte à ces pratiques au Portugal, même dans les conditions les plus restrictives, sera le début de la rampe glissante qui va plus tard forcer la même porte à s'ouvrir au nom d'un « droit de mourir » pour tous ceux qui le demandent. Les promoteurs de la « mort assistée » le savent très bien.

Il y a donc deux possibilités pour lutter contre la mort, toutes deux sont à la portée de l'État et de la société : obliger l'État portugais à investir dans un système national efficace de soins palliatifs ainsi que dans la formation de tous les professionnels de la santé à leur pratique; ensuite, encourager socialement et économiquement le renforcement des liens familiaux et de proximité, afin que les familles et les équipes médicales de soins palliatifs puissent accompagner les patients, éduquant ainsi les générations suivantes à prendre soin des malades et de ceux qui souffrent. Pour que personne ne puisse un jour demander la mort et y accéder en étant seul, pour que personne ne puisse souffrir sans avoir reçu les soins médicaux adaptés à son état, ou même sans se sentir un fardeau pour sa famille et pour la société, après l'avoir servie comme citoyen et enrichie par son travail.

Bruxelles, le 4 juin 2018

"Malaise au sein de la Commission de contrôle de l'euthanasie: un médecin en fin d'année" - RTL Info du 6 Janvier 2018 .

Jean-Louis Vincent: « Maintenons la santé mais pas la vie à tout prix » ; Journal Le Soir du 25 de Février de 2014 .

Source : euthanasiestop.be